De retour au bercail depuis samedi 27 août 2016 , après les Jeux olympiques de Rio , Cissé Cheick Sallah entre multiples rendez-vous et sollicitations , a accepté pour afrikipresse.fr, de revenir sur l’exploit réalisé dans la capitale économique brésilienne. Interview inédite et exclusive avec un champion au mental de fer symbole d’une jeune ivoirienne et africaine sans complexe , qui en veut.
Comment avez-vous vécu l’accueil à votre arrivée à Abidjan ?
Nous ne nous attendions pas à un tel accueil qui nous a vraiment fait plaisir. Nous étions émerveillés. La seule chose qu’on tire d’un tel accueil , c’est la force pour pouvoir continuer à donner le meilleur de nous-mêmes et donner plus de lauriers au pays.
Revenons un peu sur votre combat, cette finale à suspens au cours de laquelle vous avez été longtemps malmené par votre adversaire, le Britanique Lutalo Muhammad , avant de triompher de ce dernier, à la dernière seconde, par 8 points à 6. Expliquez nous un peu ce revirement de situation extraordinaire ?
Comme on le dit ; ‘’découragement n’est pas Ivoirien’’. Jusqu’à la fin, je devais me battre et je l’ai fait. Ma préparation a duré plusieurs mois. Cinq mois exactement et nous avons préparé plusieurs tactiques. Donc, dès l’instant où j’étais mené, j’ai mis ces tactiques en place. Si vous avez bien suivi le combat, j’ai mis en place certaines de ces tactiques qui n’ont pas fonctionné et la dernière a marché au bon moment. Ce sont des choses qu’on apprend à l’entrainement et j’étais très heureux.
Est-ce qu’avec cette médaille d’or , on peut dire que c’est une revanche contre des détracteurs quant on sait qu’une dizaine de jours auparavant, vous aviez été accusé d’harcèlement sexuel ?
Je ne veux même pas parler de ce qui n’a jamais existé et qui n’existe pas. En fait, Dieu ne donne rien au hasard. Il y a d’abord des moments sombres mais, comme je vous l’ai dit , je ne veux même pas parler de ce qui n’existe pas.
Aujourd’hui , 32 ans après Gabriel Tiacoh, qui, lui, avait remporté la médaille d’argent aux 400m masculin aux Jeux Olympiques de Los Angeles, aux Etats-Unis, qu’est-ce que ça vous fait de savoir que vous êtes le premier ivoirien à rentrer dans l’histoire avec la médaille d’or ?
D’abord , je suis très heureux de cet exploit-là. Ce que je peux tirer de cet enseignement, c’est que cette victoire pour moi, est un message que j’adresse à la jeunesse ivoirienne. Depuis 32 ans, il n’y avait personne pour arriver à un tel niveau. Aujourd’hui, quelqu’un sort de ‘’nulle part’’ et remporte une telle médaille. Je m’entraîne à Abidjan, dans des conditions qui ne sont pas forcément les meilleures et je remporte la médaille d’or. C’est un message de travail et de bravoure que je veux donner non seulement à la jeunesse ivoirienne mais aussi africaine. Ça veut dire que lorsqu’on croit à ses rêves, avec le travail, on peut les réaliser. C’est un peu ça.
Parlez-nous un peu de votre condition de préparation , parce que semble-t-il que tout n’a pas été rose ?
Pas que j’étais dans des conditions très minables mais, je peux vous dire que les conditions n’étaient pas totalement réunies pour un tel exploit. Pour gagner, il a fallu que je me donne à fond. Vous convenez avec moi qu’on ne peut pas comparer les conditions de préparation du Britannique aux miennes. C’est le jour et la nuit. Il a fallu du cœur pour obtenir un résultat pareil. Ce résultat là, je le voulais pour mon propre challenge parce que j’ai fait des résultats incroyables dans des compétitions précédentes : Médaille d’or au grand prix de Moscou, en Russie, médaille d’argent au grand prix de Turquie. Médaille de bronze au grand prix de Manchester, au Royaume-Uni. Trois fois médaille d’or en Afrique, notamment au Congo Brazzaville, à Port-Saïd, en Egypte et à Tunis, en Tunisie. Sans compter les jeux mondiaux universitaires, en Corée du sud où j’ai remporté une médaille d’argent. Il y a aussi les opens internationaux où j’ai obtenu des médailles d’or en Allemagne et en Croatie…C’était donc un vrai challenge pour moi. Donc quel que soit les moyens qui avaient été mis à ma disposition pour la préparation , c’était pour moi , quelque chose de mental. Je m’étais dit qu’il fallait que je parte le plus loin possible dans cette compétition. C’est un peu ce qui a fait la différence.
Il semble que vous avez reçu des sollicitations de certains pays à competir sous leurs drapeaux. Lesquels ?
Oui ! Avant même ces jeux olympiques, j’ai reçu beaucoup de sollicitations. La Côte d’Ivoire est un pays de sports. Pas seulement moi, tous les athlètes reçoivent des sollicitations. Moi, j’ai reçu beaucoup de sollicitations de la part de plusieurs pays. Mais mon père m’a toujours dis ; «Cheick, tu es au Taekwondo pas pour de l’argent mais tu y es parce que je n’ai pas pu réellement le pratiquer comme je le voulais ». Je suis super fier de combattre pour mon pays, et ne dit-on pas qu’on ne change pas l’équipe qui gagne ? Il est donc mieux de rester en Côte d’Ivoire pour gagner plutôt que d’aller dans un autre pays où on ne sait pas ce qui va arriver.
Dites-nous quels sont les pays qui vous ont approché ?
(Longue hésitation : Ndlr) Il y a plusieurs pays mais, permettez que je vous cite un seul nom : le Qatar.
Lors qu’une interview que accordée par votre mère, dame Mariam Lassi à Afrikipresse , elle a dit être très heureuse de votre victoire. Que représentent pour vous, la cellule familiale et les amis ?
La famille et les amis comptent beaucoup pour moi , pour mon équilibre. Aujourd’hui, j’ai une lourde responsabilité parce qu’on ne me voit plus comme la même personne mais plutôt comme un exemple. Et j’essaierai de supporter au nom des miens, cette charge là. Pour terminer, permettez-moi de dire merci à la population. Nous ne nous attendions pas à une telle foule qui est venue nous accueillir et cela nous a vraiment fait plaisir. Je dis merci beaucoup à tous ceux qui ont effectué le déplacement. Merci également pour tous les messages qu’on reçoit. Merci aussi à la presse qui essaie de nous mettre au devant de la scène. Je vous dis merci.
Claude Dassé