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Opinion

Chronique du lundi – la digitalisation des procedures administratives : une priorite pour Anne Désirée Ouloto 

Chronique du lundi – la digitalisation des procedures administratives : une priorite pour Anne Désirée Ouloto 
Publié le
Par
Christian Gambotti
Lecture 6 minutes

J’ai toujours dit que les trois piliers du développement économique et social d’un pays et des réponses aux urgences nouvelles (crises sanitaire et climatique) étaient l’État, le secteur privé et l’administration publique. Il existe deux rêves absurdes : le rêve communiste d’un État sans économie et le rêve libéral d’une économie sans État. Le premier rêve a pour résultat l’État totalitaire, le second rêve livre les populations à la main invisible du marché. C’est pour cela que le ministère de la Fonction publique et de la Modernisation de l’Administration est un ministère hautement stratégique et que l’action de Madame Ouloto est éminemment politique. La vision qu’elle porte, « Zéro papier dans l’Administration à l’horizon 2030 », est un projet de société qui s’inscrit dans la vision politique que s’est donné l’État. 

Le Pilier 4 du projet « Une Côte d’Ivoire solidaire » donne en effet toute leur dimension politique à la modernisation de l’Administration publique et à la digitalisation des procédures administratives. Tous les usagers, – les individus, les entreprises, les administrations elles-mêmes et l’État -, tirent un profit immédiat de la mise en œuvre des services numériques dans l’administration publique. Pour le gouvernement Ouattara, il s’agit d’atteindre les quatre objectifs suivants : 1) répondre aux attentes des usagers, longtemps confrontés à la lourdeur et aux lenteurs d’une administration pléthorique et bureaucratique, 2) uniformiser géographiquement le service public (les mêmes procédures administratives et des réponses rapides sur tout le territoire) 3) éradiquer tout clientélisme et toute corruption 4) faciliter et valoriser le travail des agents de l’État.

Le cadre est double : une administration digitalisée et une gouvernance numérique. D’ailleurs, le ministère de la Communication et de l’économique numérique et celui de la Fonction publique de la Modernisation de l’Administration avancent ensemble. Le résultat attendu est double aussi : répondre aux attentes des populations en leur permettant d’accéder à des services publics de qualité et accélérer le progrès national en répondant aux enjeux du développement. 

L’E-administration et l’E-gouvernement, qui sont indissociables, constituent des progrès indéniables : l’E-administration améliore la qualité des services publics et simplifie l’accès aux procédures administratives ; l’E-gouvernement assure une meilleure circulation de l’information sur les actions de l’État (communication institutionnelle) et une meilleure transparence de la gouvernance. 

Pour le ministre de la Communication et de l’économie numérique, Amadou Coulibaly, « la digitalisation des services publics est une priorité pour notre gouvernement. » Il précise que l’engagement du gouvernement à exploiter le potentiel des technologies numériques est total dans le but d’améliorer les services publics afin de répondre, de façon plus rapide, plus efficace et plus transparente, aux besoins de tous les usagers. 

Dans un domaine précis, celui des concours administratifs, Mme la ministre d’Etat, ministre de la Fonction publique de la Modernisation de l’Administration, Anne Désirée Ouloto, vient d’appeler à la digitalisation complète de la chaîne des concours administratifs et ceux de l’ENA, afin d’améliorer leur organisation et lutter contre la corruption, le favoritisme et le clientélisme.

Un prêt de 75 millions d’euros de la BAD pour la digitalisation des procédures administratives

Le mercredi 5 juillet 2023, le Conseil d’administration du Groupe de la Banque Africaine de Développement (BAD) a accordé  un prêt de 75 millions d’euros à la Côte d’Ivoire, afin de renforcer la digitalisation des procédures administratives. Ce prêt couvre 68%  du coût total du projet, le reste étant abondé pour 18% par la coopération allemande (20 millions d’euros) et pour 14% par le gouvernement ivoirien (16,05 millions d’euros). En améliorant la productivité de l’administration ivoirienne et en réduisant les coûts et les délais de transactions des opérations administratives, le gouvernement poursuit la modernisation du pays. 

Bien entendu, le projet intègre les questions de sécurité numérique dans la collecte, le stockage et le partage des données publiques. Il est en effet nécessaire de sécuriser l’ensemble de l’écosystème numérique : protection des données des individus, des entreprises et de l’Etat. Dans une chronique récente (1), j’avais indiqué que la révolution numérique était  en marche en Afrique, mais j’avais évoqué le danger que représente la transformation digitale, l’Afrique étant le continent qui subit le plus les cyberattaques qui sont de plus en plus sophistiquées.

Ce prêt va permettre d’accélérer la mise en place d’un Observatoire national du développement numérique et de doter la Côte d’Ivoire d’un Datacenter aux normes internationales. Pour Mme Anne Désirée Ouloto, l’exploitation des gisements de données, dont la profusion est en train d’exploser, devient le carburant indispensable des administrations et organisations publiques, dès l’instant qu’il s’agit d’accompagner le développement de la société et du pays, développement rendu possible par  la vulgarisation et la démocratisation d’internet, des smartphones et des réseaux sociaux en Afrique. 

Dans les fonctions qu’elle occupe aujourd’hui, Mme la ministre d’Etat souhaite réaliser un véritable « choc administratif », un « choc de simplification », en renforçant et en améliorant l’accès numérique dématérialisé aux services et données des administrations de Côte d’Ivoire. Ce « choc administratif », qui s’appuie sur l’utilisation des outils numériques, permettra certes d’améliorer la productivité de l’administration, mais il créera un environnement qui améliorera les conditions de travail des agents publics et valorisera leur rôle par une participation plus active à la vie socio-économique du pays. 

De façon évidente, l’E-administration participe pleinement à la transformation culturelle des fonctionnaires et des agents de l’administration. Autre point important pour Anne Désirée Ouloto, la dématérialisation administrative améliore les performances de l’administration et renforce sa crédibilité au plan national comme au plan international, car elle met fin à l’opacité et à la lourdeur des procédures administratives, elle accélère la demande et la délivrance des documents administratifs, elle permet de lutter contre les fractures territoriales, le clientélisme et la corruption.

La dématérialisation des procédures administratives est l’un des leviers indispensables à la modernisation du secteur public. A côté des outils numériques institutionnels mis à leur disposition – l’adresse www.modernisation.pouv.ci et le portail www.servicepublic.gouv.ci -, il existe le portail citoyen « Miliê », lancé en février 2019. « Miliê » est une plateforme interactive de recueil, de traitement et de gestion des préoccupations des usagers du service public dans un souci de transparence, traçabilité et responsabilité dans l’action administrative.

L’Etat africain est toujours perçu dans sa dimension politique. Il convient aujourd’hui d’appréhender l’Etat comme une réalité sociale complexe à partir de l’analyse des administrations, des services publics et des relations entre fonctionnaires et usagers, mais aussi à partir de l’analyse du rôle des fonctionnaires dans le développement national.

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  1. Chronique publiée dans l’Intelligent d’Abidjan du 22 avril 2024, « L’Afrique au défi de l’Intelligence Artificielle (IA).

Christian GAMBOTTI –  Agrégé de l’Université – Président du think tank Afrique & Partage – Directeur général de l’Université de l’Atlantique- Directeur du CERAD (Centre d’Etudes et de Recherches sur l’Afrique de Demain) – Directeur des Collections L’Afrique en Marche, Planète francophone -Essayiste, chroniqueur, politologue, géopoliticien – Contact : cg@afriquepartage.org

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