Le Grand Prix Martial Sinda de la poésie francographe 2023, du nom du premier poète de l’Afrique équatoriale française, a été lancé pour commémorer le 20e anniversaire du Printemps des Poètes des Afrique et d’Ailleurs, qui se tiendra à Paris en mars 2023.
A destination des résidents des Pays du Sud et des Outre-Mers, le Grand Prix Martial Sinda était ouvert du 10 mai au 31 octobre 2022. Chaque candidat devait soumettre une vingtaine de poèmes inédits sur le thème : mémoire, histoire et résistance. Trois Ivoiriens ont été sélectionnés. Premier bilan avec Thierry Sinda le président du jury.

Le Grand Prix Martial Sinda de la poésie francographe 2023 à destination des pays du Sud et des Outre-Mers est-il une bonne moisson ?
Thierry Sinda : Nous avons été surpris par le nombre des candidats, par la diversité de leur origine, et surtout par la qualité et pertinence de leur recueil inédit, offrant, chacun avec ses vers, une réponse originale au thème Mémoire, histoire et résistance, marqueur de la Négritude parisienne hier et de la Néo-Négritude parisienne aujourd’hui. Nous avons reconstitué une Néo-Négritude artificielle sans port d’attache ; car un mouvement demande un lieu, un manifeste, des disciples qui se rencontre et échangent. Ce qui m’enchante fortement en tant initiateur de la Néo-Négritude ! Les 33 poètes sélectionnés ne se connaissent pas entre eux, et nous ne les connaissons pas non plus. Nous avons lu et relu attentivement plus de mille pages pour dans un premier temps les sélectionner, puis les départager. Les textes des auteurs sélectionnés sont en provenance : 6 du Cameroun, 4 de Côte d’Ivoire, 3 du Congo, 3 de Madagascar, 3 du Bénin, 2 de RDC, 2 du Sénégal, et 1 respectivement : Algérie, Chili, Gabon, Guadeloupe, Îles Canaries, Île de la Réunion, Mali, Mayotte, Tchad.
Quels sont les quatre auteurs sélectionnés en provenance de Côte d’Ivoire ?
TS : De Côte d’Ivoire, nous avons reçu les recueils inédits d’une quarantaine de pages de trois Ivoiriens et d’un Congolais, résidant à Abidjan. Les poètes ivoiriens, que je cite, par rapport à la primauté d’envoi de leur texte poétique, sont : Sinaly Bakayoko de son nom de plume Ali Badra IBN Moktar Bakayoko pour La nuit des roses (né le 30 avril 2000 à Koumassi ; Il est étudiant en sciences juridiques à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké. Il a publié un recueil de poèmes) ; Hermann Hokou pour Vers rouges de sang noir (né le 6 janvier 1984 à Dabou ; il est juriste international. Il est co-auteur de quatre livres et a été lauréat de plusieurs prix de poésie dont celui du Concours de Poésie du Val de Fontenay [France] pour son poème Au Balcon de l’Histoire) ; Effi Frédéric Akpenan pour La rose épineuse (né 2 avril 1990 à Bouaké. Il a fait un cursus de lettres à l’Université Félix Houphouët Boigny. Il est professeur de français diplômé de l’ENS d’Abidjan. Il n’a pas encore publié) ; et le poète congolais Gloire Ngoyi, résidant à Abidjan, pour Lumière sombre (né le 15 décembre 1994 à Pointe Noire au Congo Brazzaville (aucune publication à son actif).
Au regard des candidats qui vous ont soumis leur recueil de poèmes inédits sur le thème idoine, vous êtes parvenus à mettre sur pied un concours littéraire international. Pensez-vous que vous auriez pu le faire en résidant dans un pays africain ?
TS : Tout est toujours possible où que vous soyez ! Cependant il est vrai que Paris jouit d’un grand prestige, c’est la capitale des lettres africaines francophones par excellence. Il me revient, à ce moment précis, des titres forts et fondateurs de la littérature africaine francophone, écrits par des Ivoiriens à l’époque coloniale : Un nègre à Paris de Bernard Dadié (1959), ou Kocumbo, l’étudiant noir d’Ake Loba (1960, il est le premier récipiendaire pour ce roman du Grand Prix Littéraire de l’Afrique noire en 1961). De nos jours encore même le chanteur-sapeur congolais Kofi Olomidé chante Quartier Latin du nom du nom du célèbre quartier de Paris, qui abrite la Sorbonne, le Collège de France et les lycées de classes préparatoires, ce même Paris fut le berceau de la Négritude parisienne. En Afrique, il ya eu de très belles aventures éditoriales avec les éditions NEA, qui regroupaient la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Togo. Les Nouvelles Editions Africaines diffusaient dans toute l’Afrique francophone de l’Ouest et bien au-delà. En Afrique centrale ce rôle était joué par les éditions Clé au Cameroun. Il se passe des concours littéraires intéressants en Afrique, qui devraient davantage s’accoler le nom de pionniers de la littérature africaine ; comme on le fait en Occident avec les auteurs occidentaux. Il est vrai que pour la médiatisation, donc pour la reconnaissance, Paris a un grand avantage : malheureusement la reconnaissance se fait du Nord vers le Sud.
Ne pensez-vous pas qu’internet et les réseaux sociaux ont changé la donne ?
TS : Oui il y a davantage de contenu du Sud qui vont vers le Nord. Il faudrait maintenant que les sociologues africains en face une étude sérieuse (si ce n’est pas déjà fait) pour mettre en évidence l’impact des productions de contenu du Sud dans les pays du Nord. C’est un sujet de mémoire de master ou de thèse doctorale !
Pouvez-vous nous rappeler quels sont les membres du jury ?
TS : Nous sommes au nombre impair de 7. Ce qui permet au président d’exercer pleinement sa voix prépondérante. Les six autres membres sont : Moa Abaïd (acteur et metteur en scène algérien, il a travaillé avec les plus grands hommes de théâtre, notamment avec Patrice Chéreau) ; Henri Moucle (poète martiniquais distingué) ; Marie-France Danaho (grande dame de la poésie guyanaise) ; Habib Osmani (poète algérien travaillant sur la mémoire de l’immigration. Il est préfacé par les Ministres Jacques Toubon et Yamina Benguigui) ; Denise Chevalier (poétesse et bibliothécaire martiniquaise ; et grande lectrice dans le cadre du Printemps des Poètes des Afriques et d’Ailleurs) ; et Francine Ranaivo (nièce du poète de renom Flavien Ranaivo, poétesse et présidente-fondatrice de l’Alliance Internationale des Femmes de France et de Madagascar).