Le 23 juin dernier, le peuple Britannique a voté de manière décisive pour sortir de l’UE et reprendre son destin en main. Beaucoup d’encre a coulé quant aux motivations des 17 millions de citoyens qui ont résisté au projet antidémocratique poursuivi par l’UE. Par ailleurs, il ne se passe pas un jour sans que des soi disant experts essaient de s’opposer à l’élan patriotiquue qui a animé ce vaillant peuple. Ayant suivi cette campagne de près et y ayant participé dans ses débuts avant que des divergences de stratégie ne m’en éloignent, je me propose de restituer les faits.
L’histoire du Brexit est une très belle démonstration de ce qu’un peuple peut accomplir quand il décide de puiser dans son histoire et dans ses fondations pour croire en son avenir. Avec des ressources financières limitées comparé à leur opposition, avec les médias traditionnels, la communauté internationale, les grands instituts financiers et certaines multinationales braqués contre eux, les British ont décidé de se faire confiance. Ils se sont opposés à un projet qui aujourd’hui, derrière les grands slogans unificateurs, est surtout un instrument au service des multinationales. Ces dernières en régulent les contours pour accroître leurs profits, sans considération pour la jeunesse Européenne qui croupit sous le poids du chômage, et dont les frustrations sont une aubaine pour les mouvements populistes aux idéologies dangereuses.
Certains estiment que les British s’éclipsent et abandonnent le reste de l’Europe à un moment où la solidarité devrait primer. Cet argument ne tient pas debout car les Britanniques ont tout d’abord tenté une renégociation des termes de leur adhésion a l’UE. Cette mission de la dernière chance a été traitée avec dédain par les élites Européennes telles que François Hollande et Jean-Claude Juncker, le président de la Commission Européenne. Ils n’ont pas hésité à affirmer qu’aucune concession majeure n’avait été faite au Premier ministre Britannique d’alors, David Cameron. Ce mépris pour la volonté sincère des Britanniques de rester dans une Union Européenne, réformée pour mieux faire face aux défis du XXIè siècle, est exactement le modus operandi de l’UE, dès lors qu’elle est contredite dans ses ambitions supranationales. De plus, en quittant l’UE, les Britanniques ne décident pas de cesser toute relation commerciale et diplomatique avec leurs voisins dont la prospérite affecte la leure. Ils décident de reprendre le contrôle de cette relation et d’affirmer que le projet d’intégration politique que poursuit l’Union Européenne et qui demande l’abandon de la souveraineté de ses Etats membres, ne correspond pas aux ideaux sur lesquels cette Nation s’est bâtie. Une nouvelle relation peut donc ainsi être négociée, telle qu’elle existe avec d’autres Nations Européennes très prospères telles que la Suisse et la Norvège, qui ont décidé de rester à l’écart du projet Européen.
Certains estiment que cette décision conduira la Grande-Bretagne dans un abîme économique. Cet argument est facile à réfuter. Un bon nombre de pays de l’UE, et particlulièrement ses locomotives que sont la France et l’Allemagne ont tout intérêt à ce que des accords commerciaux continuent de leur garantir un accès au marché Britannique. De plus, l’accès au marché Européen et la coopération dans les projets tels qu’Erasmus, le programme d’échange universitaire; est ouvert aux pays non Européens, alors comment imaginer que la Grande-Bretagne, alliée historique, en soit écartée? Il faut aussi reconnaître que l’UE dans un Monde où de nouveaux marchés émergent, perd chaque année un peu plus de son poids économique. Son attitude généralement protectionniste l’a empêché jusque-là de conclure des accords commerciaux de libre échange avec les économies telles que l’Inde et la Chine. C’est contre ce genre de pratiques que les voix traditionnellement plus libérales des Britanniques se sont élevées. D’ailleurs, au lendemain du Brexit, la Chine, l’Inde et même les USA malgré les déclarations condescendantes du President Obama lors de la campagne, ont tous affirmé être prêts à négocier dans les plus brefs délais des accords commerciaux de libre échange. Cela devrait continuer de garantir à la Grande-Bretagne de prospérer dans l’après Brexit. Elle s’insére dans la nouvelle architecture économique Mondiale, en usant de ses atouts tels que ses relations spéciales et historiques avec les mastodontes que sont les USA, la Chine, l’Inde, et pourquoi pas le continent Africain dont les économies les plus prometteuses sont des produits de l’influence Britannique.
Certains ont qualifié la campagne du Brexit de xénophobe, animée par une envie de repli sur soi d’une partie du peuple Britannique, motivée par le rejet des immigrés. Certes, les conséquences d’une immigration non contrôlée sur le marché de l’emploi et l’offre de services publics, a participé au rejet de l’UE par les couches sociales les plus defavorisées. Ce sont elles qui vivent les conséquences de cette politique migratoire mal pensée, en voyant leurs revenus stagner et leur accès aux services de base compromis; sans compter les risques de conflits communautaires. En sortant de l’UE, les Britanniques optent pour un système qui permettrait d’offrir les mêmes chances aux immigrés quel que soit leur pays d’origine, de s’installer et contribuer à la prospérité de cette Nation, traditionnellement terre d’accueil et de refuge. N’est-ce pas en Grande-Bretagne que le dissident d’alors qu’était Karl Marx a trouvé de l’abri pour continuer de travailler sur ses théories qui à l’époque étaient jugées controversées, même dans son pays d’origine: l’Allemagne. La Grande-Bretagne a rejeté le système discriminatoire qui donnait la priorité aux citoyens Européens, et obligeait les autorités à rejeter des candidatures de citoyens de pays avec lesquels bien souvent, la Grande-Bretagne entretient des relations historiques. Loin d’être un vote xénophobe, le Brexit est un vote d’ouverture sur l’ensemble de la planète qui correspond mieux à la vision que les Britanniques ont toujours eu d’eux-mêmes.
Au-delà des procès d’intention faits ci et là, la véritable motivation du vent de rejet qui s’est abattu sur la Grande-Bretagne le 23 Juin dernier, est très romantique au fond et c’est de la France qu’on aurait attendu un tel cri de rage face à la tyrannie de l’UE. La démocatie directe, pouvoir donner congé tous les cinq ans ou réembaucher leurs élus, est ce pour quoi 17 millions de Britanniques se sont dressés face à l’UE. Pour assouvir son désir de gouvernance supra national, elle asservit progressivement les gouvernements nationaux et ignore les volontés populaires, comme cela a été le cas dans lors du référendum en France et aux Pays-Bas. Qu’un peuple ait décidé de freiner l’arrogance d’élites non élues et de réaffirmer la suprématie de son Parlement, mérite de l’admiration de la part de tous les amoureux de la démocratie.
Cet article est une introduction à la politique et à la société Britannique, qui bien souvent est vue comme étant une démocratie Occidentale comme les autres. C’est de la même manière que l’Afrique a tendance à être envisagée comme un bloc, sans nuances. Je ne prétends pas avoir la science infuse, et je suis bien entendue ouverte à la contradiction quant à mon interprétation de la société et de la politique Britanniques. L’après Brexit est le moment où le Monde va redécouvrir la Grande-Bretagne, cette Nation qui, le 23 Juin dernier, a décidé de reprendre sa liberté, à la British, sans effusion de sang ou confrontations, mais par la voix des urnes. Il est à espérer que les Eurosceptiques du continent Européen, dont les frustrations montent à chaque nouvelle usurpation de pouvoirs de la part des architectes du projet Européen, feront preuve d’autant de classe lorsque comme toute dictature avant elle, l’UE s’effondrera. Au travers du Brexit, les sans voix du Monde entier peuvent comprendre qu’un mouvement organisé, solidaire et déterminé, lorsqu’il porte les aspirations du peuple, peut faire plier les arbres enracinés dans la subversion du jeu democratique. l’Afrique en rêve, les Britanniques l’ont fait, et pourtant beaucoup d’Africains s’insurgent…La veulent-ils réellement cette liberté?
Youma Nana