Afrkipresse.fr a rencontré à Accra le porte-parole de Laurent Gbagbo. Katinan Koné a abordé plusieurs sujets dont la chute du président Blaise Compaoré au sujet de laquelle il tire les enseignements suivants:
” Le premier enseignement qu’on tire c’est que c’est une leçon à nous tous. Je vais répondre à cette question à trois niveaux. D’abord, c’est une bonne chose pour nous tous. Ensuite, Blaise Compaoré a fait trop de mal à son peuple mais aussi, il a trop instrumentalisé son peuple dans plusieurs conflits pas dans l’intérêt de ce dernier, mais pour son propre intérêt en tant qu’homme d’affaires et ça, c’est moralement inacceptable.
Que se soit la guerre au Liberia, en Sierra Leone, en Côte d’Ivoire et même en Angolais, son implication n’est pas liée à des questions idéologiques ou même dans l’intérêt du peuple burkinabé, mais plutôt à son intérêt à lui. En Côte d’Ivoire par exemple, il a fait croire aux Burkinabés qu’ils étaient persécutés et eux aussi se sont laissés avoir, alors que c’était dans son intérêt personnel. Je trouve cela criminel. Il faut que le peuple burkinabé comprenne qu’il a été instrumentalisé par Blaise Compaoré pour ses intérêts personnels.
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Deuxièmement, j’apporte mon soutien au peuple digne burkinabé qui a su écrire en lettres d’or sa propre histoire. Enfin, troisièmement, je ne suis pas d’accord sur la façon dont on met la pression et sur l’opposition burkinabé et sur les militaires. Je suis même choqué par l’attitude de la communauté internationale.
Les militaires burkinabé n’ont pas fait un coup d’Etat. Un peuple se lève, et chasse tout un régime. Ce qui se passe au Burkina est une révolution parce que pour une révolution, il y a deux conditions : la façon brutale dont cela a été conduit et l’objectif poursuivi. Est-ce que les Burkinabé voulaient simplement que Blaise Compaoré seul s’en aille ? Je ne le crois pas. En brûlant l’Assemblée nationale ça veut dire que c’est tout le système que le peuple ne voulait plus.
[Et au lieu de l’aider à sortir le pays de cette impasse, on lui met la pression. ]
C’est vrai que les Burkinabé par rapport à leur histoire, avec beaucoup de coups d’Etat qu’ils ont connus, se méfient un peu de leur armée mais, lorsque tout un régime disparaît comme ça, la seule institution républicaine encore débout sur laquelle le peuple peut s’adosser est l’Armée.
Et au lieu de l’aider à sortir le pays de cette impasse, on lui met la pression. Après 27 ans de dictature, on ne peut pas sortir comme cela de cette situation, il faut plutôt aider les militaires à conduire le peuple sur la voie de la démocratie plutôt que de lancer un ultimatum avec des propos choquants comme le fait l’Union africaine. (…)
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La sortie de l’Union africaine était donc exagérée et manipulatrice. J’ai par contre trouvé l’approche de la CEDEAO très sage. J’ai appris qu’il y a des consultations, à laquelle ne participe pas l’armée en vue de la mise en place d’un gouvernement de transitions. Cela est dangereux. (…)
Alors, le civil que l’on recherche pour diriger la transition burkinabé, on va le trouver où, et selon quel critère ? Et puis, les militaires ont pris le pouvoir lorsqu’ils ont chassé Moubarak en Egypte, qui s’en est plaint ? Mais pourquoi, c’est toujours en Afrique noire que nous sommes frileux. On leur met la pression inutile alors qu’ils ont besoin de calme et de sérénité pour organiser les élections dans le pays.”
Claude D, à Accra