En Côte d’Ivoire y’a vraiment t-il du nouveau sous le soleil ? Nous ouvrons ici une série Archives avec des faits , discours et écrits passés dans plusieurs médias du pays dont l’Intelligent d’Abidjan (IA) , pour permettre de comprendre que l’on peut éviter le pire qui advient souvent. Ici un texte paru dans l’IA en janvier 2011 , en pleine crise post électorale.
“Bédié est bien , mais c’est son entourage qui l’a trompé. Guéi était bien mais c’est son entourage qui l’a trompé. Demain on écrira que Laurent Gbagbo est un homme bien qui a été abusé et trompé par son entourage. Moi je n’ai jamais été d’accord avec cette façon de présenter les choses. J’ai toujours estimé que Henri Konan Bédié et ses proches devaient assumer les erreurs commises et non s’en prendre à leur entourage. Certains aiment accuser Faustin Kouamé ou Emile Constant Bombet au sujet de l’Ivoirité mais tout le monde a vu que le président Bédié lui-même a toujours assumé et revendiqué ce qu’il a fait. Pareil concernant Robert Guéi. Trop facile de dire qu’il a été manipulé par son entourage et par Laurent Gbagbo.
Concernant la situation de crise en Côte d’Ivoire , des informations persistantes laissent entendre que plusieurs personnes , et même des cadres du FPI, avaient tenté d’approcher le chef de l’État pour qu’il dissuade Paul Yao N’dré de le proclamer vainqueur après la proclamation des résultats par Youssouf Bakayoko. Monseigneur Ahouana a dit récemment avoir entrepris la même démarche. Selon ceux qui ont effectué cette démarche , le Conseil constitutionnel devait annuler le vote au Nord et procéder à la convocation d’une nouvelle élection. Pendant ce temps , Laurent Gbagbo restait en poste , jusqu’à la prestation de serment du nouveau président élu. Certes Ouattara aurait peut-être dit non , mais cette position aurait été difficile à tenir devant l’application stricte de la loi.
La communauté internationale aurait eu du mal à afficher la présente attitude. À l’hôtel du golf, l’on avait même craint ce cas de figure : « On a eu peur, même s’il est clair qu’on allait gagner en reprenant toute l’élection , on allait vouloir rester sur les principes et cela nous aurait fragilisé et divisé. Gbagbo n’avait qu’à faire appliquer la loi , pour nous emmerder et gagner du temps en restant au pouvoir. La loi prévoit 45 jours, mais il aurait pu bien négocier 60 à 90 jours. Qui sait s’il aurait renversé la situation comme Alpha Condé ? Il a cru qu’une foi que le conseil constitutionnel a parlé, on se tairait tous. » .
Mais voici que le Président Gbagbo propose un recomptage des voix et une évaluation de tout le processus électoral. Malgré les dénégations et les questions de principe , cette proposition peut être perçue comme une sorte de remise en cause de la compétence en dernier ressort du Conseil constitutionnel. Elle signifie certes la bonne foi du chef de l’État qui veut la paix. Mais elle peut également vouloir dire que la solution politique, est toujours au dessus des lois. Ce sont les arrangements politiques et les libertés prises avec les lois, qui nous ont conduit à la paix. Beaucoup de personnes avaient mis en garde contre cette façon de faire , contre les candidatures exceptionnelles, contre les ajustements du code électoral par ordonnance , contre l’intégration de l’Accord de Ouaga dans les attendus et les visas des différents décrets.
À plusieurs reprises, dans les décrets signés par le chef de l’État on lisait : Vu la constitution, Vu l’accord de Ouaga et les accords complémentaires….Bon laissons ça, il s’agit du passé, diront certains. Mais que fait-on dans le présent ? Si Laurent Gbagbo est certes sûr que les recomptages des voix , peuvent le donner vainqueur et confirmer l’arrêt du Conseil constitutionnel , mais que fera-t-il alors dans le cas contraire ? Dans le cadre d’une évaluation et d’un recomptage qui estime que le vainqueur est bel et bien Alassane Ouattara que fait-on ? Peut-on alors remettre en cause une décision du conseil constitutionnel, comme on l’a fait après le premier tour ? Puisque Yao Ndré avait proposé le 21 Novembre 2010 pour le second tour , tandis que le gouvernement a trouvé des dispositions légales pour donner droit à la requête de la CEI , contre une décision ou un avis du Conseil constitutionnel , pourtant non susceptible de recours … Union africaine, Cedeao, Ligue arabe, Uémoa, un représentant de Ouattara, de Gbagbo, un représentant de la CEI, du Conseil constitutionnel, un musulman, un chrétien ou autre ; un représentant des chefs et rois traditionnels ; des acteurs comme Boga Sako Gervais ou des personnes marquées de chaque camp seront récusées au titre des personnalités de bonne foi proposée par le chef de l’État.
Comment espérer qu’avec un tel comité, les données changent en faveur de Laurent Gbagbo ? Le problème n’est pas de recompter pour savoir si Ouattara a perdu et Gbagbo a gagné ; le problème est plutôt de savoir si les requêtes de Laurent Gbagbo étaient fondées ou pas ? C’est la prise en compte des requêtes par le Conseil constitutionnel qui change les résultats. Hormis cela , le Conseil constitutionnel est bien d’accord sur l’ensemble des PV et chiffres transmis dans le délai , indépendamment de la proclamation (hors délai) des résultats. Depuis le début de la crise postélectorale, la position de Ouattara et de ses soutiens n’a pas varié : j’ai gagné, Gbagbo doit partir. Au passage, le camp Ouattara a commis une erreur de casting avec la menace de descente sur la RTI.
Même si cela a poussé aussi à la faute les FDS, avec les morts et les exactions, avec le recul, il est possible déplorer que Guillaume Soro et Ouattara n’aient pas choisi d’organiser de simples rassemblements pour montrer qu’ils ont du monde. Des marches et des rassemblements éclatés partout en Côte d’Ivoire et dans les quartiers d’Abidjan. En plus de l’appel à la désobéissance civile et des opérations villes mortes. Rassembler dix mille, vingt mille, trente mille, cinquante mille personnes chaque jour, dans des endroits du pays et d’Abidjan peut être aussi efficace que de vouloir prendre la RTI. Le camp Ouattara en refusant de jouer le temps, en restant souvent impatient, et en croyant qu’avec le temps Laurent Gbagbo pourrait avoir raison de la détermination des électeurs RHDP et de la pression de la communauté internationale , a oublié que dans la durée , la plus grosse victime de la crise ne sera que Laurent Gbagbo.
Que pèse un président élu pour cinq ans, sortant d’une crise de dix ans , qui l’a déjà fatigué ? Que pèse un président sans ambassadeurs , sans reconnaissance internationale , dont les ministres ne peuvent participer à aucune réunion internationale ? Que pourra-t-il si demain les sanctions sont étendues au niveau de l’Onu. À ce titre l’Intelligent d’Abidjan avait indiqué que la crise prendrait fin peut être dans deux ou trois mois , mais surtout quand chacun serait allé au bout de sa logique et de ses forces. En face du camp Ouattara et de ses erreurs , le camp Gbagbo est dans une position délicate. Qui le pousse à céder et concéder. On peut bien avoir l’armée avec soi, la télévision publique avec soi, l’essentiel de l’administration et le contrôle des bâtiments officiels, mais l’exercice du pouvoir d’État va bien au delà de ces symboles , dans un contexte marqué par la présence d’une rébellion armée sur une grande partie du pays.
La fermeté affichée les premiers jours par le Président Gbagbo fait place à des ouvertures et à des appels au dialogue. Les démarches de la Cedeao et de l’Ua sont désormais un peu applaudies parce qu’elles ont choisi de privilégier le dialogue. Pourtant la communauté internationale a été vouée aux gémonies. La ligne de défense est difficile. Je déplore la situation dans laquelle se trouve la Côte d’Ivoire et le président Laurent Gbagbo. Il ne méritait pas cela. Je refuse qu’on pousse à la trahison Philipe Mangou et les militaires. Je suis d’accord pour que tout le monde soit solidaire à ses côtés , mais pour moi , seul Laurent Gbagbo peut résoudre la crise postélectorale. Laurent Gbagbo n’est l’otage de personne.
Laurent Gbagbo est un leader. Un leader est un homme qu’on suit , qui a une vision. À l’époque en tant que leader Laurent Gbagbo a imposé le front républicain au FPI. Lorsqu’il a senti que cela ne l’arrangeait plus , il n’a pas réuni le parti pour demander son avis. Nous avons tous vu comment Laurent Gbagbo a poussé le peuple et ses partisans à accepter le dialogue direct et la nomination de Guillaume Soro à la Primature. L’intelligent d’Abidjan a été jusqu’au bout , le seul journal qui a régulièrement critiqué Guillaume Soro. Alors que faire ? Que proposons-nous ? Sans l’accord et l’acceptation de Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara ne peut pas accéder au fauteuil présidentiel , ni encore moins gouverner tranquillement. Bédié a fait roi Ouattara , Gbagbo l’intronisera. En ces temps incertains, en ces temps de peur et mensonges partout, en ces temps de radicalisation personne ne gagne à menacer Laurent Gbagbo et son entourage.
Il s’agit pour nous, pour tous et désormais pour les médiateurs de lui demander pardon en ces termes : « Président pardon. Tu n’as sans doute pas tort, tu es incompris, et l’histoire te donnera raison mais aujourd’hui, nous nous mettons à genoux, nous te demandons pardon. Pour la Côte d’Ivoire, pour les Ivoiriens, accepte la victoire de Ouattara. Pardon président de te demander cela, mais fais le pour ton pays ». Tous ceux qui aiment Laurent Gbagbo, devraient engager cette démarche de pardon, car sans l’acceptation de Laurent Gbagbo, la guerre et l’option militaire feront 1000, 2000, 3000, 4000, jusqu’à 100 mille morts et même plus. Avec l’usage de la force Laurent Gbagbo sera certes délogé , mais le prix à payer sera lourds, trop lourd même, avant de mettre hors d’état de nuire et de tuer, tous ceux qui sont susceptibles de créer la guerre civile et le génocide annoncé. Quand Laurent Gbagbo a eu besoin de la paix, il n’a pas hésité à aller voir Bédié et Ouattara au sujet de la marche du 15 Mai 2010. Que font les autres pour toucher le cœur de Laurent Gbagbo.
Charles Kouassi