En mission aux États Unis pour le renforcement de la réconciliation et la cohésion nationale entre les populations ivoiriennes, le ministre Kouadio Konan Bertin a donné les nouvelles fraîches de la Côte d’Ivoire à ses interlocuteurs au 2424 Massachussets Avenue, adresse de l’ambassade de Côte d’Ivoire au pays de l’oncle Sam.
«La démocratie dans notre pays se renforce. Les désaccords s’expriment désormais par le bulletin de vote et non plus par les armes», a dit entre autres le ministre ivoirien de la réconciliation et de la cohésion nationale, alors qu’il donnait des nouvelles fraîches aux ivoiriens et ivoiriennes de la diaspora résidant dans les environs de Washington.
C’était au cours d’une rencontre ce samedi 1er octobre 2022, à l’ambassade ivoirienne à Washington. Ci-dessous l’intégralité de son message liminaire. Ce message a été suivi par une vingtaine de question durant deux heures d’échanges, en présence de SEM Ibrahim Touré, Ambassadeur de Côte d’Ivoire aux États Unis, et SEM Inza Camara , consul de Côte d’Ivoire à New-York.
“Excellence Monsieur l’Ambassadeur, Mesdames et Messieurs membre de l’ambassade,
Monsieur le Directeur de Cabinet Adjoint du Ministère,
Monsieur le chef de cabinet,
Monsieur l’Inspecteur Général du Ministère,
Messieurs les directeurs centraux et conseillers techniques,
Ivoiriennes et Ivoiriens des États-Unis,
Je vous adresse mes salutations fraternelles. Je remercie les organisateurs de cette rencontre ainsi que tous les participants. Non sans oublier de faire une mention spéciale à Son Excellence Monsieur l’Ambassadeur Ibrahima Touré ainsi qu’à ses collaborateurs.
Je suis particulièrement heureux de vous rencontrer aujourd’hui aux Etats-Unis. Je vous remercie de votre présence. Ces derniers mois, j’ai multiplié les déplacements à l’étranger pour
rencontrer les Ivoiriennes et Ivoiriens de la diaspora. Ces déplacements m’ont conduit en France, au Royaume-Uni et désormais jusqu’ici, aux Etats-Unis. Partout où je suis allé, j’ai ressenti la même énergie, la même vigueur, le même bonheur. Partout où je suis allé, j’ai rencontré la Côte d’Ivoire.
Le sang ivoirien qui coule dans nos veines nous lie. Peu importe où nous sommes nés, peu importe où le vent nous a mené, nous sommes tous Ivoiriens et nous le restons.
Vous qui composez la diaspora ivoirienne des Etats-Unis, vous constituez l’un des ponts les plus essentiels entre la Côte d’Ivoire et le monde. Vous diffusez notre culture, notre art de vivre, nos coutumes. Vous diffusez notre histoire, vous la faites vivre au quotidien, vous construisez notre avenir. Vous vivez dans l’un des pays les plus puissants et les plus influents au monde. Irriguer les Etats-Unis de ce que nous sommes, c’est en irriguer une bonne partie du monde.
En retour, vos expériences américaines sont utiles à notre pays qui a besoin d’ouverture et de modernité.
L’identité ivoirienne est structurée par des valeurs nobles consacrées dans notre hymne national. La Côte d’Ivoire est, à l’image des Etats-Unis, riche de son ouverture et de sa diversité. L’espoir, l’hospitalité, la dignité, voilà des valeurs que les deux pays partagent.
Si nous pouvons être fiers de ce que nous sommes, nous ne devons pas pour autant oublier d’où nous venons. Notre peuple a souffert. Il s’est affronté bien trop longtemps et bien trop violemment. Le sang de nos frères et sœurs a coulé. La terreur a régné sur des désaccords exploités. Des familles ont été déchirées, des corps ont été martyrisés, des avenirs ont été brisés.
Aussi difficile soit-il, ce passé, nous devons l’assumer. La paix ne peut se construire sur l’oubli et les ressentiments. Le travail historique doit être poursuivi, la vérité recherchée et la justice rendue. N’oublions pas les mots d’Aimé Césaire : « une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte ». Ensemble, nous devons lutter pour que plus jamais n’adviennent les horreurs du passé.
Vous qui composez la diaspora de notre pays, vous formez la 32ème région de Côte d’Ivoire. Vous représentez plus d’un million de frères et de sœurs. Si la réconciliation ne se fait pas avec vous, elle ne se fera donc pas.
Les ressentiments, les vieilles oppositions ethniques et religieuses n’ont plus leur place dans le cœur des Ivoiriens. Le respect, la solidarité et l’amour de l’autre même dans la différence, voilà ce qui doit nous guider.
La paix est le seul combat « qui vaille d’être mené » écrivait Albert Camus. C’est le « devoir le plus sacré de la nation » proclamait le grand Félix Houphouët-Boigny.
En œuvrant pour la réconciliation et la cohésion nationale, Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire se bat pour la paix. Aujourd’hui, je vous invite à vous battre à ses côtés. La Côte d’Ivoire a besoin de vous parce que la bataille pour la paix est une bataille perpétuelle qui doit être menée par tous. Vous qui constituez la diaspora de notre pays, vous représentez 1 million de soldats pour la paix. La Côte d’Ivoire ne saurait se passer de vous.
Vous qui vivez aux Etats-Unis, vous savez pertinemment que la prospérité, la liberté et le bonheur, rien de tout cela n’est accessible sans la paix. Vos liens avec la Côte d’Ivoire sont nombreux. Vous aussi vous souhaitez que le peuple de Côte d’Ivoire connaisse la prospérité, la liberté et le bonheur.
Mesdames et Messieurs,
Le processus de réconciliation et de cohésion nationale en Côte d’Ivoire est de façon indiscutable pleinement engagé. La reconnaissance de la réussite de ce processus de pacification par l’Organisation des Nations Unies nous honore et nous encourage à poursuivre et à intensifier nos efforts.
Le succès de ce processus est le fruit de la rencontre de deux volontés. La volonté du peuple d’abord, dans son entièreté et la volonté de son gouvernement.
Les Ivoiriennes et les Ivoiriens manifestent tous les jours cette volonté. Depuis qu’il a plu à Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de me confier la responsabilité de Ministre de la Réconciliation et de la cohésion nationale, je n’ai eu de cesse que de parcourir le pays, d’aller à la rencontre des Ivoiriennes et des Ivoiriens, des plus en difficulté aux plus aisés. J’ai rencontré les forces vives du pays, les organisations syndicales, religieuses et associatives et les chefs traditionnels. Je me suis rendu dans des villes et des villages où les tensions étaient vives. A chacun de mes déplacements, à chacune de mes rencontres, j’ai fait le même constat : le peuple de Côte d’Ivoire aspire à vivre en paix.
Le pays peut également compter sur la volonté du gouvernement de réconcilier le peuple. Je tiens aujourd’hui à saluer l’engagement du Président de la République, son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, à promouvoir à chaque instant la réconciliation, la cohésion et la paix dans notre pays. A chacune de ses décisions, il conserve comme fil directeur le rassemblement et l’ouverture pour le bien de la Côte d’Ivoire, en associant toutes les bonnes volontés.
Vous le savez, je me suis opposé au Président de la République lors des deux dernières élections présidentielles. Et pourtant, c’est à moi qu’il a confié la lourde tâche de réconcilier les Ivoiriennes et les Ivoiriens. C’est donc dire que cette mission n’est pas une affaire de parti politique. C’est une priorité nationale.
Aux volontés du peuple et du gouvernement à réconcilier le pays, j’ajoute la bonne volonté des oppositions politiques.
Lorsque son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République échange en juillet dernier avec ses deux prédécesseurs Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié, c’est une victoire pour le pays. C’est un témoignage de bonne volonté. C’est un acte de réconciliation. C’est un signal de cohésion.
La réconciliation du peuple ivoirien est un cercle vertueux. Alors que la violence appelle à davantage de violence, l’apaisement conduit à l’apaisement.
Réconcilier le pays et consolider sa cohésion, ce n’est en rien l’éradication des différences. Nous ne croyons pas tous en la même religion, nous ne sommes pas tous de la même ethnie, nous n’avons pas tous les mêmes opinions politiques, mais nous sommes tous Ivoiriens. Inspirons-nous de cette pensée de Barack Obama qui a un jour déclaré « Nous venons de différents endroits et nous avons des histoires différentes, mais nous partageons des espoirs communs et le rêve américain. ». Nous aussi, peuple ivoirien, avons des espoirs communs.
Nous aussi, nous pouvons croire au rêve ivoirien.
La démocratie dans notre pays se renforce. Les désaccords s’expriment désormais par le bulletin de vote et non plus par les armes. Les élections législatives de mars 2021 ont été les plus inclusives de l’histoire de notre jeune démocratie. Elles se sont déroulées dans le calme et sans violence. L’opposition politique s’exprime désormais librement au
Parlement et contribue à faire vivre le débat démocratique en Côte d’Ivoire. Les élections législatives et sénatoriales partielles de 2022 se sont également bien déroulées. Collectivement, nous devons faire en sorte que les élections municipales et régionales de 2023 se déroulent de manière aussi exemplaire. L’élection présidentielle de 2025 doit être un tournant pour la démocratie de notre pays. Le scrutin devra être d’une transparence absolue et devra se dérouler dans un climat pacifique et inclusif. Il y a quelques jours, j’ai félicité la Commission électorale indépendante pour son travail et je l’ai invitée à maintenir le cap. Tous ensemble, nous pouvons faire de la démocratie ivoirienne une démocratie exemplaire.
Notre peuple se parle davantage aujourd’hui qu’il ne se parlait hier. Lorsque 21 partis politiques, dont le RHDP, le PDCI-RDA, le PPA-CI, le FPI, et 26 organisations de la société civile se mettent autour de la table pour discuter, ils répondent à l’aspiration du peuple de Côte d’Ivoire à vivre en paix.
Le dialogue politique s’est achevé le 4 mars 2022 avec la signature par tous les participants d’un rapport qui formule plusieurs recommandations pour poursuivre l’apaisement du climat politique en vue des prochaines élections.
Abandonner la violence comme mode d’accession au pouvoir, mettre en place un processus de réparation et d’indemnisation des victimes de la crise électorale de 2020, renforcer la culture démocratique et civique au sein de la société civile, voici quelques-unes des avancées majeures pour notre pays.
La recherche de consensus grâce à un dialogue ouvert, transparent et inclusif, c’est placer avant toute chose l’intérêt supérieur de la nation.
Chers membres de la diaspora,
La terre de vos ancêtres est en paix et accueille tous ses enfants. Depuis que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a retiré la Côte d’Ivoire des pays à risque, l’immense majorité des exilés est rentrée au pays. Le retour du Président Gbagbo a marqué une étape importante du processus de réconciliation. Le retour de Charles Blé
Goudé en sera une autre. Nos compatriotes rentrent au pays parce qu’il n’y a plus l’ombre d’un doute : la réconciliation est durablement engagée.
Le processus de réconciliation et de cohésion nationale en cours en Côte d’Ivoire contribue au développement du pays en le pacifiant. Il n’y a pas de développement durable sans paix. Et c’est grâce au développement économique que nous pouvons nous attaquer efficacement aux inégalités, aux injustices et à la misère. Un récent rapport du cabinet d’intelligence économique et de conseil Oxford Business Group confirme que l’économie de notre pays est tirée par une croissance du produit intérieur brut plus forte que ses voisins. Notre croissance est également plus durable et inclusive.
Malgré la crise, elle s’est maintenue à un taux positif. Le taux de pauvreté diminue et continuera de diminuer, appuyé par le programme national de développement 2021-2025.
Vous qui composez la diaspora ivoirienne, je sais que vous êtes attachés au développement économique de la Côte d’Ivoire. Vous aussi, vous souhaitez que le pays devienne une économie leader en Afrique. Vous aussi, à votre manière, vous luttez contre la pauvreté, le désespoir et la résignation.
Votre contribution est essentielle et le pays vous en remercie.
Si vous me le permettez, je souhaiterais vous passer un message qui me tient à cœur.
L’économie ivoirienne a besoin de vous. De nombreuses opportunités sont à saisir en Côte d’Ivoire. Certains secteurs comme l’agro-industrie, la transformation de nos matières premières, la banque, le tourisme, l’énergie ou le BTP sont particulièrement porteurs. Je vous invite à y investir si vous le pouvez. A minima, je vous demande d’en parler autour de vous ici, aux Etats-Unis. Encouragez les investissements ! Le rapport du cabinet d’intelligence économique et de conseil Oxford Business Group que j’évoquais précédemment estime que la Côte d’Ivoire se positionne « comme un pôle d’investissement majeur en Afrique de l’Ouest ». Faites savoir au monde que la Côte d’Ivoire est en paix, qu’elle se réforme qu’elle a soif de développement !
Si un peuple en paix c’est un peuple qui peut connaître le développement, le progrès et la prospérité, un peuple qui souffre c’est un peuple en danger.
Le contexte international n’épargne pas la Côte d’Ivoire. Même si notre économie résiste, elle subit les conséquences de la guerre en Ukraine. L’inflation est forte et le prix de certaines matières premières ou alimentaires comme le blé est en hausse. Ces incertitudes sont autant de risque pour la paix de notre pays. Le Gouvernement a anticipé ces chocs et très vite, nous avons mis en œuvre des mesures pour protéger le peuple ivoirien. En parallèle, nous facilitons et encourageons la production, la transformation et la consommation de produits locaux.
Chères Ivoiriennes, chers Ivoiriens, enfants de Côte d’Ivoire, La Côte d’Ivoire déborde d’énergie.
Votre patrie est une terre d’opportunités. J’ai pour habitude de dire que les petits ruisseaux font les grandes rivières. C’est la somme de petites actions qui finit par avoir un gros impact. Martin Luther King disait que « Tout le monde peut être important car tout le monde peut servir à quelque chose. » Aujourd’hui, je vous appelle à la responsabilité. Je vous demande de vous engager pour votre pays à la mesure de vos capacités.
En vivant aux Etats-Unis, vous acquérez des compétences et des savoirs que vous pouvez mettre au service du pays. Si vous ne souhaitez pas rentrer en Côte d’Ivoire, c’est votre décision et je la respecte entièrement. Je sais que vous portez la Côte d’Ivoire dans votre cœur. Alors, partagez nos valeurs et notre histoire, placez au centre de tout votre âme ivoirienne et rejetez les ressentiments, les discriminations et toute forme d’injustice.
Pour ceux qui le peuvent, investissez en Côte d’Ivoire, contribuez au rayonnement économique du pays.
Je sais qu’il reste du chemin à parcourir pour atteindre la réconciliation totale de notre pays. Je travaille d’arrachepied avec mon administration et le gouvernement à mettre en place de nouvelles mesures, de nouveaux mécanismes pour renforcer le processus.
Ivoiriennes, Ivoiriens,
Nous avons traversé des zones de turbulences. Je sais que le passé est encore présent dans bien des esprits. Mais la conviction que je porte n’a fait que se renforcer au fil de mon action. Le peuple ivoirien, en Côte d’Ivoire ou ailleurs, fait le choix de la raison.
En poursuivant le processus de réconciliation et en faisant triompher la cohésion nationale, nous installons la paix durable. Divisés, nous ne pouvons rien. Ensemble, nous pouvons tout.
Avant de mettre un terme à mon propos, et au risque même de me répéter, il me plaît de vous confier que depuis toujours Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, Président de la république se bat pour la Paix. Aidons-le à l’installer durablement.
À cet égard, je renouvelle aujourd’hui l’appel solennel et pressant du Gouvernement à l’union, au rassemblement, à la cohésion et à la solidarité.
Je vous remercie. ”