Après avoir passé quatre ans à la tête du gouvernement ivoirien (90-94), l’unique premier ministre du président Félix Houphouet Boigny retournera au Fonds monétaire international (FMI) en juin 1994 en qualité de directeur général adjoint. Une maison qu’il connaît très bien pour y avoir occupé les fonctions de haut cadre de 1968 à 1973 puis directeur Afrique de 1984 à 1988. En réintégrant le FMI et fort de son expérience de premier ministre, ancien gouverneur de la Bceao, Alassane Ouattara est persuadé que l’institution doit davantage tenir compte de la dimension sociale qu’implique un pays. Il devint la cheville ouvrière de la puissante institution financière mondiale et l’un des concepteurs du PPTE ( pays pauvres très endettés). Il quittera à nouveau le FMI le 31 juillet 1999 pour se lancer définitivement en politique.
Alors qu’il a fallu l’accord de son pays pour que Alassane Ouattara occupe un tel niveau de responsabilité ( DGA du FMI), celui-ci fera toujours objet de calomnies dans la presse locale.
Comme si les nouveaux tenants du pouvoir d’Abidjan jetaient le bébé et son eau de bain.
Cette attitude fera sortir le directeur général du FMI, Michel Camdessus de sa réserve. Selon l’auteur Moriba Magassouba au chapitre huit de son livre « Alassane Ouattara, la passion du devoir, page 136 », Camdessus s’est indigné du traitement singulier dont son futur numéro 2 fait l’objet de la part de la presse proche du régime ivoirien, qui le traine dans la boue.
« Il ( Camdessus, ndrl) exige des autorités ivoiriennes la cessation immédiate de la campagne de presse haineuse déclenchée contre l’ancien Premier ministre et demande au président Bedie que, pendant l’exercice de ses fonctions au fonds, il ne soit pas porté atteinte à l’honneur et à la dignité de Ouattara, de sa famille et de ses proches, et que ses biens soient préservés », écrit Moriba.
Mais cette haine du pouvoir Bedie n’aura aucun effet négatif sur la mission de Ouattara au sein du FMI.
Lui dont le champ d’action, outre le continent africain s’étendait à l’Europe orientale, à l’Asie, à l’Amérique latine et au monde arabe donna la pleine mesure de son talent et de ses compétences, dont l’ensemble de ces nations bénéficiera selon l’auteur.
Ouattara, l’un des concepteurs dDru PPTE
Moriba Magassouba raconte à la page 140 : « c’est avec Michel Camdessus qui lui en laisse l’entière responsabilité que Ouattara travaille à la mise en place de la facilité de l’ajustement structurel, devenue ensuite la facilité d’ajustement structurel renforcé, (FASR), renforcée au plan des ressources et au plan des politiques ».
Aussi, poursuit l’auteur à la page 142 et 143 « fort de son expérience de Premier ministre en Côte d’ivoire, Ouattara, dès son retour au Fonds, prend naturellement à bras le corps l’épineux problème de la dette des pays en voie de développement. Et c’est ainsi que sur son insistance, l’action sur la dette démarre, en 1996, avec l’assentiment de son directeur général. Ces efforts aboutissent à la mise en place du Programme pour les pays pauvres très endettés ( PPTE). Il parvient à ajouter le critère de la trésorerie qui doit être le service de la dette sur un ratio de recettes budgétaires. C’est précisément grâce à ce critère que la Côte d’ivoire est finalement retenue ».
Lorsque le 12 juillet 1999, le DG Camdessus annonce au conseil d’administration que son adjoint, Ouattara, ne souhaite pas renouveler son mandat, cela provoque un séisme au sein de l’assemblée.
« Au vu de nombreux témoignages émanant des différents services du Fonds, il apparaît aux yeux de tous que l’institution perdait un homme de valeur qu’elle allait avoir du mal à remplacer » note l’auteur à la page 144.
Le 31 juillet 1999, Alassane Ouattara quitte le FMI pour rentrer dans son pays la Côte d’ivoire par devoir et la passion de servir. Mais une fois encore il fera face à la dérive mortifère des ethno-nationalistes à la veille des élections présidentielles d’octobre 2000.
Philippe Kouhon