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Chronique Lundi – 9-10 mai 2022, à Abidjan : 2eme édition du cyber Africa forum

Chronique Lundi – 9-10 mai 2022, à Abidjan :  2eme édition du cyber Africa forum
Publié le
Par
Christian Gambotti
Lecture 6 minutes

Abidjan abritera, les 9 et 10 mai 2022, la deuxième édition du Cyber Africa Forum (CAF). Les meilleurs experts mondiaux viendront parler des cyberattaques et et présenter les solutions à mettre en œuvre pour se prémunir contre l’insécurité numérique. 

Formidable accélérateur de croissance, la révolution numérique est portée par cinq facteurs : 1) la pénétration d’internet et de la téléphonie mobile sur le continent 2) la formidable attirance des jeunes générations pour les NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication) 3) l’inventivité, la créativité et l’esprit visionnaire des start-up de l’écosystème digital 4) la volonté politique qui conduit les Etats à réaliser les investissements nécessaires et orienter les politiques publiques vers des stratégies de développement des processus de digitalisation 5) l’engagement des opérateurs privés et des bailleurs de fonds. 

Même s’il reste beaucoup à faire, l’Afrique bénéficie de ce fameux « leapfrog digital » qui lui permet de sauter des étapes sur la trajectoire de l’émergence avec les transformations en cours pour l’économie africaine et dans la vie quotidienne des Africains. Mais, la révolution numérique, par sa rapidité et les technologies qu’elle emploie, porte en elle des risques. Parce qu’elle devient un continent digital,  l’Afrique doit impérativement relever le défi de la cybersécurité. 

Les hackers, qui répètent sans cesse leurs attaques et réinventent tous les jours la cybercriminalité, se sont immiscés dans notre quotidien, menacent les entreprises les plus importantes et tous les Etats, les plus fragiles comme les plus puissants. Malgré l’augmentation croissante des chiffres de l’insécurité numérique, avec la prolifération des « malware » (logiciels malveillants), la sensibilisation et la formation à la cybersécurité restent insuffisantes.

Le contexte africain et ivoirien du Cyber Africa Forum

Fortement implantée en Afrique et très présente en Côte d’Ivoire, la société Atos, l’un des leaders mondiaux dans le domaine de cybersécurité, constate que le continent africain est devenu l’une des cibles préférées des hackers pour deux raisons : 1) l’Afrique est de plus en plus connectée, mais ses installations sont insuffisamment protégées 2) un manque de sensibilisation et de compétences fait que les gestes et les méthodes de sécurité ne sont ni adoptés ni adaptés et les processus de sécurisation, insuffisamment mis en œuvre. 

Constatant les chiffres inquiétants des cyberattaques, – 28 millions de cyberattaques commises entre janvier et août 2020, l’ancien ministre ivoirien de l’Economie numérique, Roger Adom, avait déclaré : « Digitaliser sans protéger, c’est dangereux ».

La cybercriminalité, qui a coûté près de 20 milliards de FCFA à la Côte d’Ivoire ces dix dernières années, s’est fortement accrue avec l’accélération de l’informatisation et la généralisation du télétravail lors de la pandémie de la Covid 19. Selon une « Etude de la maturité Cybersécurité 2021 en Afrique Francophone », réalisée par le cabinet Deloitte, 40 % des entreprises africaines ont enregistré, depuis l’arrivée de la pandémie de Covid-19, une forte augmentation des cyberattaques (logiciels malveillants et attaques de phishing). 

La généralisation du « cloud » et l’arrivée des objets connectés sont autant de nouvelles menaces qui pèsent aujourd’hui sur les Etats et les entreprises. Le principal danger, ce ne sont pas les assauts massifs des pirates informatiques, mais la protection insuffisante des installations et le manque de compétences qui font qu’il est difficile, pour les Etats et les entreprises, de lutter contre une cybercriminalité qui se réinvente sans cesse avec les nouvelles méthodes de piratage que permettent les fulgurants progrès technologiques. 

La cybersécurité doit donc, sans cesse, s’adapter, se renouveler. Face à l’augmentation des cybermenaces et constatant que les réponses étaient sous-dimensionnées, le gouvernement ivoirien a décidé de renforcer sa défense numérique en investissant,  sur la période 2021-2025, 30 millions d’euros pour renforcer la cybersécurité.

Les enjeux de l’émergence face chaos et aux guerres numériques

● L’enjeu économique – La menace d’un chaos numérique existe. Ce chaos constituerait un frein au développement économique et social de l’Afrique. En 2021, les cyberattaques ont fait perdre 10 % de son PIB à l’Afrique. Placée sous le haut patronage de Patrick Achi, le Premier ministre ivoirien, cette IIème édition du CAF est placée sous le thème suivant : « Souveraineté numérique et protection des données, leviers de croissance économique pour le continent africain ». 

Le Cyber Africa Forum se veut être cette plateforme d’échanges de référence

Franck Kié, président-fondateur de Ciberobs, plateforme de cybersécurité qui organise l’évènement en partenariat Jeune Afrique Media Group, a déclaré, en prélude au CAF : « Les risques économiques liés à la cybersécurité sont une réalité en Afrique. Le Cyber Africa Forum se veut être cette plateforme d’échanges de référence sur le continent qui rassemble les acteurs africains et internationaux de la cybersécurité afin de mettre le risque cyber au cœur des problématiques de l’Afrique, comme enjeu de son émergence ».

● L’enjeu de souveraineté – Dans cet espace virtuel ouvert que représente la digitalisation et qui offre de nouvelles possibilités de manipulation, les guerres numériques sont une réalité. L’Afrique est devenue le laboratoire mondial des manipulations numériques. On se souvient que Facebook a fermé 446 pages, 96 groupes et plus de 200 comptes Instagram administrés par la société franco-tunisienne URéputation, qui avait cherché à influencer, par la diffusion de fausses informations, des élections en Afrique francophone, notamment en Côte d’Ivoire. 

Le cyberespace est de plus en plus utilisé pour porter atteinte à la souveraineté des Etats en perturbant le fonctionnement de leurs sociétés, leur économie et leurs infrastructures de défense. Tous les Etats, grandes puissances ou puissances régionales, développent des stratégies de guerres numériques. Les manipulations se multiplient dans ces nouveaux espaces de conflictualité. Pour des raisons stratégiques évidentes, les Etats évitent d’aborder sur le fond la question des guerres numériques.

Pour André-Michel Essoungou, essayiste et fonctionnaire international camerounais, « à mesure que le continent s’arrime au réseau Internet, le risque de la manipulation numérique grandit, principalement par le biais des réseaux sociaux. » La révolution numérique crée un monde plus ouvert que tente de s’approprier la cybercriminalité, l’innovation technologique facilitant l’accès à l’information et permettant toutes les manipulations. La cybersécurité, qui est aussi une technologie, se heurte à deux obstacles : le coût des investissements et la nécessité d’une mise à niveau perpétuelle. 

En prenant ses fonctions, le nouveau ministre de la Communication et de l’Economie numérique, Amadou Coulibaly, a tenu à rappeler que, pour atteindre les objectifs de sécurité et de souveraineté numérique, la Côte d’Ivoire, à travers la « Stratégie Nationale de Cybersécurité » portée par deux structures, le Conseil National de Cybersécurité et l’Autorité Nationale de la Cybersécurité, va se doter des infrastructures, de la législation et du capital humain nécessaires. 

Pour le ministre Amadou Coulibaly, qui prononcera le discours d’ouverture de la IIè édition du CAF, si la révolution numérique est un puissant accélérateur  de croissance économique, il ne faut jamais détacher les questions de cybersécurité des processus de développement du cyberespace et de l’écosystème digitale.

Christian Gambotti
agrégé de l’université,
Président du think tank Afrique & Partage, –
Directeur général de l’Université de l’Atlantique, politologue, éditorialiste.
Pour réagir : cg@afriquepartage.org

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