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Afrique- Le long chemin vers la monnaie unique

Afrique- Le long chemin vers la monnaie unique
Publié le
Par
Charles Kouassi
Lecture 4 minutes

Annoncée pour 2021, elle risque de prendre plus de temps et même ne pas voir le jour à cause de plusieurs obstacles.  En août 2003, l’Association des gouverneurs des banques centrales africaines annonçait une monnaie unique et une banque centrale commune d’ici  2021. Même si l’Afrique y a  tout à gagner le chemin vers ce projet  ambitieux demeure semé d’embûches.

 

Faire  converger une cinquantaine de monnaies nationales des pays africains subsahariens en une seule , est une ambition qui donne le vertige à la plupart des économistes monétaires. Pourtant selon les projections de l’association des gouverneurs des banques centrales africaines, cette monnaie sera mise en place d’ici 2021.

L’architecture monétaire actuelle en Afrique remonte aux lendemains des indépendances. Elle est composée de deux unions monétaires basées sur le Franc Cfa regroupant 14 pays : L’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) qui comprend le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte-d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo avec un franc CFA  émi par la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest .L’Union monétaire de l’Afrique centrale CEMAC (Communauté Économique et Monétaire d’Afrique Centrale)  qui réunit  le Cameroun, la République centrafricaine, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad. La monnaie commune, émise par la Banque des États d’Afrique centrale, est également le  franc CFA.

“Durant la période coloniale, il y avait en réalité une monnaie unique pour l’Afrique de l’ouest britannique et une autre pour l’Afrique de l’ouest francophone, tandis que les colonies portugaises utilisaient l’escudo portugais et au Libéria, c’est le dollar américain qui avait cours. Après les indépendances, cette balkanisation monétaire a perduré à tel point qu’elle a découragé le commerce intra-régional et le développement de ces pays”, explique à Anadolu, Dr Prao Yao Séraphin, expert monétaire, président de l’Association des théoriciens africains de la  monnaie et fervent défenseur de la monnaie unique.

Le Dr Yao Séraphin estime que  «le régime monétaire de la zone franc est un frein à l’intégration des pays africains. Mieux, il favorise une intégration verticale (intégration entre les pays africains francophones et la France), au détriment d’une intégration horizontale (intégration entre les pays africains ».

Le lancement en janvier 1999 de l’Euro est venu confirmer qu’une intégration monétaire africaine  est possible d’autant plus que le projet ne manque pas d’avantages. Une monnaie unique  permettra notamment de développer les échanges en minimisant les pertes de change. Elle éliminera les risques de changes qui grèvent le coût des transactions, réduira les risques liés à l’incertitude des prix et limitera les flux de capitaux spéculatifs liés au différentiel des taux de change.

 «Quand dans le même espace cohabite des monnaies gérées différemment la convertibilité n’est pas souvent aisée. La monnaie unique va permettre de doter l’espace d’un système de paiement efficace et mettre fin à l’utilisation des monnaies tierces dans les transactions intra-régionales et aux inconvénients qui en résultent », analyse Dr Yao Séraphin.

Pour arriver à une monnaie unique en 2021, les gouverneurs des banques centrales africaines  projettent de créer d’abord d’autres zones monétaires régionales pour enfin les fédérer. Une troisième  zone monétaire au sein de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest), devait voir le jour en premier. Dénommée Zone Monétaire de l’Afrique de l’Ouest (ZMAO) avec une monnaie baptisée Eco; cette zone devait fusionner dans un second temps avec celle existante (UEMOA et ZMAO) en une seule zone.

Si le projet d’une monnaie unique reste pour le moment une chimère c’est que les obstacles à sa réalisation ne manquent pas. En témoigne que cette  troisième zone monétaire régionale est renvoyée aux calendes grecques depuis 2003. La mise en place de «l’Eco» (nom de la monnaie prévue pour l’espace  ZMAO) a été reportée deux fois en 2005 puis en 2009.

Selon le Dr Yao, cet échec est essentiellement dû au fait que  «des étapes étaient nécessaires : la suppression des droits de douane et des taxes équivalentes, l’établissement d’un tarif extérieur commun, l’harmonisation des politiques économiques et financières, la suppression des barrières à la libre circulation des personnes et des biens, des services et des capitaux ».

Autre obstacle selon M.Yao «  La concurrence entre les pays francophones, anglophones et lusophones. D’ailleurs si le choix du régime de change et la devise de rattachement ne sont pas encore connus, c’est à cause de cette rivalité ».

Enfin la forte dépendance entre le Franc Cfa et la France  car la banque de France garde une influence notable sur la zone CFA. Accepter de facto de couper le cordon ombilical  « signifie pour la France doit lâcher son emprise sur cette partie de l’Afrique », selon  le Dr Yao.

Malgré ces écueils l’espoir de voir un jour l’Afrique parler  la même « monnaie » est toujours permis. Un comité de pilotage d’un fond monétaire africain a été mis en place en juin dernier et fonctionnera comme une chambre de compensation qui rendrait d’abord  convertible les monnaies nationales sur le continent et ouvrir vers la route vers une monnaie unique qui supplantera les 48 monnaies actuelles.

 

‎Anadolu Agency 

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