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    Francophonie : le sommet de 2024 en France boudé par les grands médias français (Interview Patrick Lozes) 

    Francophonie : le sommet de 2024 en France boudé par les grands médias français (Interview Patrick Lozes) 
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    Salon des banques de l'UEMOA et des PME

    Acteur de longue date de la promotion de l’égalité et de la diversité en France, Patrick Lozes est secrétaire général d’Avenir de la langue française (ALF) et porte-parole d’initiatives francophones.

    ALF est une ancienne association française initiée par Philippe Rossillon, l’ambassadeur Bernard DORIN et d’autres. Agréée en France par le ministère de la Justice, le ministère de la Culture et de la Communication, ALF est également l’un des membres fondateurs d’initiatives francophones. «C’est tous ensemble que nous écrirons l’Histoire des femmes et des hommes de l’espace francophone ! Nous aussi, « nous sommes Molière ». L’Histoire est en marche, rejoignez-nous !», exhorte Patrick Lozes dans cet entretien exclusif avec Afrikipresse. Selon lui, la francophonie doit beaucoup au dynamisme de l’Afrique. Il estime également que les étudiants francophones devraient bénéficier d’un titre de séjour pluriannuel et l’obtenir très rapidement. 

    Afrikipresse : Comment définiriez-vous le projet des “Initiatives Francophones” dont vous êtes le porte parole? Quels sont vos objectifs ? 

    Patrick LOZES : Initiatives francophones (IF) est une plateforme associative, constituée d’associations provenant de Belgique, du Quebec, des Etats-Unis et de France bien sûr qui accueille et promeut les initiatives de la société civile. L’objectif principal d’IF est, au travers d’actions originales, et novatrices de faire redécouvrir le concept de francophonie pour le rendre actuel et moderne. Nous souhaitons également renforcer la francophonie dans ses 3 dimensions (une langue, un espace, des êtres humains) dans tous les territoires où le Français est présent que ce soit en Europe, en Afrique, dans les Caraïbes, aux Amériques, en Asie, en Océanie et même en Antarctique où la langue française est bien présente.

    Initiatives francophones, c’est un souffle nouveau une énergie puissante pour la langue française, pour l’espace francophone ainsi que pour les femmes et les hommes francophones ou francophiles ; ces derniers sont bienvenus parmi nous. Vous le voyez, nous avons de grandes ambitions pour les francophones de tous horizons !

    En tant qu’acteur de la promotion de la langue française, que retenez vous du sommet de la Francophonie qui vient de prendre fin ?

    Je retiens la place importance acquise par la société civile. Il ne sera plus possible de revenir en arrière. Je regrette que le sommet ait un peu été laissé de côté par les grands médias français.

    Pouvez-vous détailler et développer le manque d’intérêt des grands médias français ?

    Le Sommet de la francophonie se déroulait en France pour la première fois depuis 33 ans, mais la couverture médiatique n’a pas été à la hauteur de l’événement.

    Ni avant, ni pendant, ni après, le Sommet, la presse quotidienne et régionale n’a publié de grands articles sur les enjeux pourtant nombreux autour de la langue française, ni sur les sujets qui préoccupent le monde francophone particulièrement en effervescence en cette année 2024.

    Faut-il créer un Erasmus francophone ? Quelle réponse francophone apporter aux secteurs économiques en tension en France dans l’enseignement du français, dans les métiers de la santé, ou du numérique ? Comment aborder les questions de sécurité dans le monde francophone ?

    Les magazines, la radio et la télévision ont fait le service minimum sur le Sommet. Il a fallu attendre la réponse apportée indirectement par le président de la République Emmanuel Macron aux propos polémiques tenus par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau sur l’immigration, pour susciter des reprises médiatiques.

    Les agences de presse n’ont pas relayé les initiatives nombreuses autour du Sommet : le village de la francophonie au Centquatre, le défilé de mode des créateurs francophones à la Gaîté lyrique, « FrancoTech » le premier salon uniquement dédié aux innovations en français.

    Il faut dire que la situation politique en France n’a pas aidé. Thani Mohamed Soilihi, secrétaire d’État chargé de la Francophonie et des Partenariats internationaux, auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères a été nommé 15 jours avant le Sommet.

    Nous attendons de lui qu’il donne une visibilité accrue aux thématiques liées à la francophonie. Nous attendons de lui qu’il parvienne à convaincre l’ensemble de ses collèges du gouvernement ainsi que le Premier ministre Michel Barnier de l’importance de ces questions pour la France, sa diplomatie et son économie.

    Nous attendons également de Thani Mohamed Soilihi qu’il sensibilise à la cause francophone les acteurs institutionnels notamment François Bayrou désormais à la tête du nouveau haut-commissariat au Plan désormais regroupé avec France Stratégie. Le secrétaire d’État chargé de la Francophonie a du pain sur la planche !

    Quelle est selon vous la place de la langue française dans le monde aujourd’hui avec les différentes contestations de la France sur le continent africain ?

    Il y a aujourd’hui selon l’OIF et différents auteurs, entre 320 et 580 millions de personnes dans l’espace francophone. La langue française est porteuse d’un double idéal : celui de la fraternité et de la liberté. La francophonie représente un phare au milieu de l’océan des difficultés, des menaces et des replis. Elle ne tolère pas la haine de l’autre, elle est pacificatrice et humaniste.

    La langue française peut et doit, non seulement coexister avec les autres langues, mais les aider. L’espace francophone est un espace de dialogue, d’ouverture notamment en Afrique. Il ne vous aura pas échappé que les contestations de la France sur le continent africain se font… en français.

    Le défilé pour la francophonie autour du thème  #JeSuisMoliere , © DR 

    Pourquoi avoir organisé un “défilé citoyen de la francophonie” pour fêter la langue française au lieu d’un “colloque citoyen” ?

    PL : Des colloques, il y en a eu beaucoup ! Nous en avions organisé un, un an plus tôt à Sciences po. Organiser un défilé était plus difficile, mais bien plus original qu’un colloque.
Nous avons voulu travailler pour l’histoire en organisant le premier défilé de la société civile francophone pour que ce sommet soit véritablement la fête de la francophonie, dans toute sa diversité.

    Nous avons voulu être dans la rue pour célébrer la langue française avec toutes celles et ceux qui l’aiment et clamer notre appel au rassemblement des francophones sous la bannière #JeSuisMolière. Ce défilé était une grande première dans l’histoire de la francophonie et il y en aura d’autres !

    Aviez-vous atteint les objectifs recherchés ?

    
Heureusement que non car le défilé était le lancement de la campagne “Je suis Molière”.

    Cette dernière est une fusée à plusieurs étapes : Tout d’abord, la marche du 5 octobre 2024 était une valorisation de la langue française avec la signature d’un engagement dédié (consultable sur #JeSuisMolière ou initiativesfrancophones.org), visant à exprimer son soutien actif à l’exercice de la langue française, puis la mise en place d’un financement participatif sur HelloAsso et des actions plus ciblées à destination des étudiants et des travailleurs.

    
Après le défilé nous avons fait un serment sur le lieu de dispersion du défilé (Place de l’ïle de Sein). Le Serment de la Place de l’île de Sein enjoint qu’à chaque Sommet de la Francophonie, la société civile exprimera les aspirations des Francophones et des Francophiles y compris dans la rue pour porter haut les valeurs de la francophonie ainsi que celles des hommes et des femmes qui la composent.

    Nous avons fait le vœu dans nos vies professionnelles, dans nos vies privées, dans nos relations aux autres d’être Molière, Condé, Vignault, Duras, Senghor, Césaire et tous les autres !

    Quels sont vos rapports avec l’OIF et les autres organisations travaillant sur la question de la francophonie, la promotion de la langue française ?

    
PL: Nous travaillons en très bonne intelligence avec l’OIF.
Pour le défilé, nous avons œuvré plus directement avec les responsables de la Co-ing.

    Nous allons rapidement demander à rencontrer la secrétaire générale de l’OIF ainsi que tous les acteurs institutionnels pour partager les enseignements que nous tirerons de nos actions autour du Sommet. 

    La Plateforme Initiatives francophones est, dans sa création et son mode de fonctionnement, une première dans le monde des organisations travaillant sur la francophonie et la promotion de la langue française.

    Quelle leçon pouvez vous tirer de toutes ces initiatives de promotion de la langue française ?

    
PL : La francophonie est un formidable espace ! Dans cet espace francophone, les échanges sont facilités et tout y devient possible pour se cultiver, voyager, étudier ou commercer. Il faut continuer à enrichir cet espace en innovant avec et pour les générations futures.

    Il faut que demain l’espace francophone permette véritablement de s’enrichir les uns des autres avec nos différents accents et nos cultures. Il faut que l’espace francophone permette de trouver dans l’autre un allié qui aidera à vous dépasser et franchir les frontières.

    Quels sont vos projets actuels et futurs avec quelle place pour les diasporas africaines ?

    
Les diasporas africaines ont toute leur place, avec les autres diasporas bien sûr, dans nos associations et au sein de la plateforme Initiatives francophones. Des associations haïtiennes, camerounaises, béninoises, marocaines, des étudiants congolais et bien d’autres ont manifesté un grand intérêt pour notre défilé. Nous allons continuer à aller de l’avant avec toutes les bonnes volontés.

    L’une de nos actions futures portera sur la mobilité des étudiants francophones non européens. Il n’est pas possible qu’à l’heure où des visas s’obtiennent en quelques minutes sur Internet, que des étudiants notamment africains passent des jours à constituer des dossiers puis attendent des mois, et ceci chaque année pour obtenir un titre de séjour afin de poursuivre des études dont la durée est pourtant connue à l’avance ! Le titre de séjour des étudiants francophones devrait être pluriannuel et s’obtenir très rapidement. L’espace francophone doit d’abord faciliter la vie des francophones.

Nous sommes disponibles pour être la voix des francophones qui souhaitent que les revendications de bon sens soient portées et entendues.

    J’appelle les diasporas africaines à rejoindre nos actions et pour ce faire à nous écrire directement sur alf@initiativesfrancophones.org (mailto:alf@initiativesfrancophones.org)

    Comment voyez-vous le rôle des diasporas africaines dans la promotion de la langue française et de la francophonie ?C’est un rôle essentiel !

    La francophonie doit beaucoup au dynamisme de l’Afrique. Cependant d’autres espaces sont aussi de vibrants territoires de la langue française. J’appelle les africaines et les africains à saisir la chance qui leur est donnée de prendre une belle place, au côté d’autres terres, pour écrire l’histoire nouvelle de la francophonie !

    Les enjeux de la francophonie sont nombreux :géostratégiques, linguistiques, économiques et désormais identitaires: Nous sommes Molière, Senghor, Césaire, Lhérisson…

    Réalisée par Lassina Bamba 

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