Il n’y a pas de sot métier, dit un adage. À Conakry, pour joindre les deux bouts, Mamadou Kéita , sexagénaire sculpte des œuvres d’arts de tout genre.
Assis dans son magasin situé à Taouyah en banlieue de la capitale guinéenne, l’artisan attend des clients qui ne viennent presque pas. Pratiquant la profession de sculpteur depuis 1985, M. Kéita ne démoralise pas nonobstant le faible rendement de son métier.
Dans ce bazar, on trouve de l’ancienneté et des arts contemporains. Parmi les arts modernes, ‘’il y a un chasseur et une danseuse abstraite’’.
‘’Les œuvres anciennes sont constituées des colons qui représentent le temps de la colonisation (vêtus en bleu et blanc, ndlr), il y a des masques Banda, dents, masques Condé (communauté de la haute Guinée, ndlr), il y a le bronze, le nimba (qui symbolise la Guinée), la reine Baga sur cheval, l’oiseau Baga (une ethnie de la Guinée, ndlr), la guitare (instruments anciens), le pistolet africain, le tam-tam Baga, des tabourets Baga…’’, cite Mamadou Kéita. (Photo).
Les prix des œuvres varient selon la dimension. Il y a des pièces vendus à 75 000 GNF, 25 000GNF, 50 000GNF, à 200 jusqu’à 500 000GNF (soit 50 euros), selon la qualité.
Difficultés
Malgré l’existence du nombre important et varié d’articles dans son centre d’affaires, le sculpteur-finisseur se plaint de l’écoulement des produits. Ce, depuis que les grèves ont commencé à émailler la Guinée il y a 8 ans. ‘’ Les articles que nous exposons ici peuvent rester un mois sans qu’aucun visiteur ne vienne’’ s’est lamenté Kéita.
‘’Nos œuvres sont achetées par des rares guinéens. Ce sont les étrangers qui achètent. Depuis que les mouvements de grèves ont commencé dans le pays en 2007, nos clients ne font que diminuer. Ils rentrent chez eux. Pendant ce temps, c’est nous qui vendons les objets d’art qui endossons les conséquences’’, souligne le sculpteur.
En plus de ces obstructions, Ebola vient bouleverser ici le mode de vie des génies d’arts. ‘’Avant cette épidémie, on se déplaçait dans les autres pays pour vendre nos œuvres, mais avec ça, tout est stoppé. On ne peut ni vendre ici, ni sortir du pays. Nos clients étrangers ne viennent non plus. Ebola a aggravé le mal qui était là’’.
L’exposition des objets d’arts dans les autres pays est différente à celle de la Guinée. ‘’Là-bas, explique-t-il, on passe de magasin à magasin pour prendre une personne qui va représenter l’endroit à la foire. En Guinée, on apprend seulement par voie de presse qu’il y a ça et ça. Quand on entame les démarches, c’est très compliqué’’, raconte l’adulte.
Pourtant, nous payons les taxes à l’État , rappelle Mamadou Kéita, qui déplore le fait que l’État en retour n’ait jamais pensé à créer un centre artisanal où peuvent se regrouper les artisans guinéens pour vendre l’art du pays.
Aliou BM Diallo, à Conakry