L’échangeur de Marcory en Côte d’Ivoire, et l’échangeur de Pokuase au Ghana sont deux infrastructures majeures en Afrique de l’Ouest. Si on ne peut s’empêcher de les comparer, pour beaucoup l’échangeur ghanéen surclasse son homologue ivoirien. Tableau comparé de ces deux infrastructures.
Lorsque nous avons un pont qui passe au-dessus d’une route, alors on parle d’un échangeur à deux niveaux, parce que nous avons deux niveaux de circulation. Lorsque nous avons un second pont qui passe au-dessus du premier, on parle d’un échangeur à trois niveaux et ainsi de suite. L’échangeur de marcory est un échangeur à 3 niveaux et à six branches. Dans la ville d’Abidjan, outre celui de Marcory, nous avons deux autres échangeurs à trois niveaux à savoir, l’échangeur des 220 logements, et l’échangeur d’Agban dans la commune d’Adjamé ( en prenant en compte le passage souterrain qui mène à Yopougon, nous avons bien trois niveaux de circulation ). Deux autres échangeurs à 3 niveaux sont en construction, l’échangeur du carrefour Solibra, et l’échangeur de Bori-Bana dans le cadre du quatrième pont.
L’échangeur de Pokuase à Accra est à 4 niveaux et à huit branches ! C’est le seul de ce type en Afrique de l’Ouest, et le deuxième dans toute l’Afrique. Cet échangeur annule toute intersection de voies, les véhicules ne marquent aucun arrêt lorsqu’ils parviennent à son niveau. On remarquera que ce n’est pas le cas pour l’échangeur de Marcory. Les véhicules venant de port Bouët en partance pour Treichville et vice versa marquent un temps d’arrêt à une intersection. Pour l’annuler, il aurait fallu construire deux ponts parallèles qui seraient passés au-dessus des ponts actuels, l’un dans le sens Port Bouët Treichville , et l’autre dans le sens inverse. L’échangeur serait alors un échangeur à quatre niveaux, et comme à Pokuase, les véhicules n’auraient marqué aucun arrêt.
Il n’est pas exclu que ces deux ponts soient construits dans le futur. L’échangeur du Carrefour solibra comportait initialement un pont à deux branches. On s’est rendu compte par la suite de la nécessité de construire un troisième pont dans le sens Marcory Treichville, surplombant le premier pont. C’est ce pont, actuellement en construction, qui fait de cet échangeur, un échangeur à trois niveaux. Pokuase était également un échangeur à trois niveaux initialement. C’est le président Nana Akuffo Addo ( selon ses dires ) qui quelque mois après sa prise de fonction, s’est rendu compte qu’on pouvait ajouter un niveau supplémentaire sans pour autant accroître le prix de l’ouvrage.
L’échangeur de Pokuase a été réalisé en 30 mois. Lancée en avril 2018, l’infrastructure a été inaugurée le 09 Juillet 2021, pour un coût de 52,4 milliards FCFA. L’échangeur de Marcory a été réalisé en 24 mois, pour un coût de 24, 61 milliards FCFA, soit un peu moins de la moitié du prix de Pokuase. C’est une entreprise brésilienne qui a construit l’échangeur ghanéen, celui de Marcory a été réalisé par le groupe français Bouygues. Pokuase est ainsi vu comme un exemple réussi d’une coopération Sud-Sud.
Pokuase : un échangeur “bon marché“
L’échangeur de l’amitié ivoiro-japonaise du carrefour Solibra est l’œuvre des Japonais. Il a coûté 31 milliards pour la première phase ( le pont à deux branches ), et 25,135 milliards pour la seconde phase ( le pont actuellement en construction ), soit un coût global de 56,135 milliards FCFA. Certes l’Etat ivoirien n’a déboursé qu’une fraction de ce montant, la plus grande partie étant prise en compte par les japonais sous forme de dons. Pourtant le ” prix catalogue ” de l’infrastructure est excessif, comparé à l’échangeur de Pokuase, de loin beaucoup plus abouti, et qui a coûté 52,4 milliards FCFA. Comment expliquer cette différence de prix ? Parce que Pokuase a été construit par des Brésiliens ?
Les trois futurs échangeurs qui seront construits dans la commune de Cocody sur le boulevard Mitterrand, résultent d’une coopération avec l’agence japonaise de coopération la JICA. Ils coûteront 119 milliards FCFA, dont 80 milliards de dons japonais et 39 milliards de financement de l’Etat ivoirien. Ce sont des échangeurs assez classiques, comportant chacun un seul pont. Et pourtant selon leurs “prix catalogue”, ils seront plus chers que l’échangeur de marcory, du moins deux d’entre eux. Pourquoi les Japonais sont-ils aussi chers ?
Toujours est-il que si l’échangeur de Marcory suscite à juste titre l’admiration, celui de Pokuase suscite l’extase. Il coupe tout simplement le souffle. La nuit, le système d’éclairage le rend encore plus majestueux. Une centaine de journalistes africains venus couvrir les Assemblées annuelles de La BAD tenues du 23 au 27 mai à Accra, ont été convoyés sur le site pour une visite guidée. Tous en ont eu le souffle coupé. Cette infrastructure est aujourd’hui un passage obligé pour toute personne débarquant à Accra. C’est en soi une attraction touristique. Le Ghana a frappé un “grand coup” avec cette infrastructure, lorsqu’on prend en compte le coût relativement modeste de l’ouvrage.
Certes Abidjan n’est pas en reste en matière d’infrastructure routière, avec notamment le futur pont à hauban ( le pont de Cocody ), le futur échangeur de bori bana, le futur métro, etc….etc…. Pourtant il manquera visiblement une infrastructure de type Pokuase. Il est à espérer que le futur échangeur du grand carrefour de Koumassi qui est actuellement en projet, ou même l’échangeur Akwaba dont la première phase vient d’être lancée et qui à terme coûtera 250 milliards FCFA ( un échangeur à cinq branches dit-on ), relève ce défi. En attendant, les Ivoiriens doivent faire preuve d’un peu d’humilité quand ils parlent de l’échangeur de Marcory, car à côté il y a plus ” joli “.
Douglas Mountain, oceanpremier4@gmail.com. Le Cercle des Réflexions Libérales
