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    LEP 2025 en Côte d’Ivoire : discrédit sur la CEI ou débat légitime ?

    LEP 2025 en Côte d’Ivoire : discrédit sur la CEI ou débat légitime ?
    Publié le
    Par
    Charles Kouassi
    Lecture 4 minutes
    Salon des banques de l'UEMOA et des PME

    Analyse des critiques sur la liste électorale provisoire (LEP) en Côte d’Ivoire.

    Depuis peu, des visuels et publications circulent sur les réseaux sociaux, accusant la Commission Électorale Indépendante (CEI) de graves irrégularités dans la Liste Électorale Provisoire (LEP) 2025. À travers une communication visuellement construite, des responsables politiques du Parti des peuples africains de Côte d’Ivoire (PPACI) dénoncent l’existence d’anomalies telles que des “centenaires frauduleux”, des enfants aux filiations improbables, des électeurs sans nom de parents ou encore des cas présumés de doublons et d’usurpations d’identité.

    À regarder de plus près, plusieurs éléments permettent de relativiser ces accusations, qui semblent davantage guidées par une stratégie de décrédibilisation que par une analyse rigoureuse des faits.

    Des accusations datées et non adaptées au contexte actuel

    Les critiques relayées s’appuient sur une intervention de Me Chrysostome Blessy datant du 9 octobre 2024, soit avant même le lancement officiel de la Révision de la Liste Électorale (RLE) pour 2025. Par conséquent, elles ne peuvent s’appliquer à la LEP 2025, qui a été établie sur la base de nouveaux recensements et de données actualisées. Utiliser ces déclarations dans le débat actuel revient à se baser sur des informations obsolètes.

    Une liste déjà utilisée et validée à plusieurs reprises

    Il convient de rappeler que la liste électorale actuelle est en grande partie héritée du processus de 2008-2009, qui avait été validé à l’époque par toutes les forces politiques, dans un contexte de sortie de crise. Cette même liste a servi aux élections de 2010, puis plus récemment aux scrutins de 2021 et 2023. Des candidats des partis d’opposition, y compris ceux qui contestent aujourd’hui, ont été élus à ces occasions, sans remise en cause globale de la légitimité de la liste. Tenter encore de remettre en cause cette liste aujourd’hui peut donc apparaître contradictoire, voire contre-productif. Maître Touré avec le projet SAFE d’y et eut déjà essayée en vain.

    Les cas des centenaires et électeurs sans date de naissance : explications techniques

    La LEP 2025 comprend :
    • 80 électeurs avec une date de naissance inconnue (mais des photos montrant qu’ils sont manifestement majeurs) ;
    • 8 106 électeurs présumés centenaires (nés avant 1926), dont 94 % ont été recensés en 2008-2009, période marquée par de nombreuses erreurs de saisie.

    Dans la majorité des cas, ces anomalies trouvent leur origine dans les pièces d’identité elles-mêmes (notamment des erreurs sur les anciennes CNI). La CEI n’a pas l’autorité pour corriger ces erreurs sans documents justificatifs corrigés. Le contentieux électoral est justement prévu pour permettre ce type de rectification.

    Électeurs décédés : un traitement encadré

    Plus de 20 000 électeurs présumés décédés ont déjà été exclus de la liste provisoire grâce aux données transmises par l’opérateur Unitech. La CEI attend encore une mise à jour complémentaire. Il est cependant impossible pour la Commission de radier un électeur si elle n’a pas reçu l’information par les voies officielles. En attendant, le contrôle biométrique dans les bureaux de vote reste un rempart efficace contre la fraude.

    Sur les doublons et usurpations d’identité : prudence et rigueur requises

    Les cas présentés comme des “doublons” par certains partis ne résistent pas à l’analyse. Ils concernent souvent des personnes aux identités proches, mais biométriquement distinctes, avec des documents valides. La CEI ne peut radier un électeur sur la base d’une simple ressemblance de noms ou de dates. Une usurpation doit être prouvée, avec documents à l’appui, et signalée aux autorités compétentes.

    Parents inconnus ou mentionnés massivement : des raisons documentées

    Plusieurs milliers d’électeurs apparaissent sans mention de père ou de mère, ou avec des noms de parents très répandus. Cela s’explique notamment par :
    • l’utilisation de la nouvelle carte nationale d’identité, qui ne contient pas ces informations,
    • des erreurs ou oublis de saisie par les agents recenseurs,
    • des homonymies très courantes dans la population ivoirienne (ex : plus de 10 500 électeurs s’appellent KOUASSI AYA).

    L’absence de données sur les parents ne constitue en aucun cas un motif pour une absence dur la liste électorale.

    Une stratégie risquée de la part de certains partis

    En voulant disqualifier à l’avance le processus électoral, les partis qui portent ces critiques pourraient fragiliser leur propre position. Si la liste électorale est maintenue et qu’ils remportent des sièges ou des scrutins, leur victoire pourrait être remise en cause sur les bases qu’ils ont eux-mêmes créées. Ce jeu politique comporte donc un risque de décrédibilisation réciproque.

    Responsabilité politique et citoyenne

    La CEI, comme toute institution humaine, n’est pas exempte d’erreurs ou de limites. Mais elle a mis en place des mécanismes pour corriger les anomalies (contentieux, contrôle biométrique, audits techniques). La remise en cause permanente de son travail sans preuves solides affaiblit la démocratie elle-même.

    Il revient aux partis politiques de participer activement au processus de vérification et d’amélioration de la LEP, plutôt que de s’engager dans une campagne de discrédit préventif. Le contentieux électoral est un outil, pas une arme politique.

    Charles Kouassi

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