Le Président, Alassane Ouattara en compagnie de la Première Dame Dominique Ouattara, a pris part, à l’inauguration de la Bibliothèque Félix HOUPHOUËT-BOIGNY de l’Académie des Sciences d’Outre-mer, le vendredi 14 février 2020, à Paris. Cette cérémonie a été l’occasion pour le Chef de l’Etat ivoirien de faire une communication sous le thème : « La pensée du Président Félix HOUPHOUËT-BOIGNY et son actualité dans la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui et de demain ». Quelques extraits.
« Je suis très heureux de me retrouver, à nouveau, dans votre prestigieuse institution, qui m’a fait l’honneur de m’accueillir dans ses rangs le 4 novembre 2013. Je voudrais vous remercier de cette invitation qui m’ouvre les portes de votre belle maison dont la devise ‘’savoir, comprendre, respecter, aimer ‘’, est un programme qui nous engage tous. Aimer, était un mot que le Président Félix Houphouët-Boigny affectionnait particulièrement. Il disait très souvent : mon cœur est si plein d’amour qu’il n’y a pas de place pour la haine » a introduit Alassane Ouattara.
De la naissance du RHDP
En se référant à son nom, sa pensée, ses valeurs et son action, Alassane Ouattara décide en Juillet 2018 de fondre le RDR (Rassemblement des Républicains) au sein d’un seul et grand parti dénommé : le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP). Ainsi dira-t-il, c’était bien dans le but d’ouvrir aux Ivoiriens un label, un cadre de référence consensuel.
« L’Afrique et, notamment, la jeunesse africaine a besoin de repères, de valeurs et de figures. C’est pourquoi, je voudrais témoigner, ici, de quelques leçons apprises auprès de Félix Houphouët-Boigny » a-t-il poursuivi.
Ouattara et Houphouët, destins croisés
Le président Ouattara se souvient des premières heures de leur rencontre. Nous sommes dans les années 1970. Alors jeune économiste au Fonds Monétaire International (FMI), puis Gouverneur de la BCEAO et ensuite Directeur Afrique du FMI, il eut le privilège d’être reçu par Houphouët à plusieurs reprises.
« En 1990, c’est au cœur de la crise socioéconomique qui donnait du tourment à l’ensemble des dirigeants de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, qu’il m’a appelé à ses côtés, pour faire de moi son premier et unique Premier Ministre. J’ai eu alors le privilège singulier des séances de travail au bureau et à la maison, tôt le matin et tard le soir, en tête-à-tête ou en réunion avec le Président Houphouët (…) Aux côtés de cet homme qui avait connu les plus grands de ce monde, le néophyte en politique que j’étais, avait la lourde responsabilité de conduire des réformes économiques et financières souvent impopulaires, face à des syndicats déchaînés, contre les effets sociaux des programmes d’ajustement structurels. Dans le même temps, les nouveaux partis politiques fraîchement autorisés, avec l’avènement du multipartisme, lançaient les premières manifestations et meetings de leur jeune histoire (…) On peut le dire : je suis entré en politique en temps de crise. Heureusement comme je l’ai souvent dit, j’avais un fabuleux professeur : Félix Houphouët-Boigny » se souvient-il.
Maximes et pensées fortes d’Houphouët
Nombreux sont les Ivoiriens qui savent par cœur plusieurs idées fortes du Président Houphouët-Boigny, le président Ouattara y compris.
« Je préfère l’injustice au désordre ». « La paix n’est pas un vain mot, mais un comportement ». « Nous avons hérité d’un Etat, à nous de construire la nation ». « Le vrai bonheur, on ne l’aperçoit que lorsqu’on l’a perdu ». « L’avenir appartient à la science et à la technologie ». « L’homme est allé sur la lune mais il ne sait pas encore fabriquer un flamboyant ou un chant d’oiseau. Gardons notre cher pays d’erreurs irréparables qui pourraient dans l’avenir l’amener à regretter ses oiseaux et ses arbres ».
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Pour Ouattara, les maximes d’Houphouët-Boigny venaient ponctuer les souvenirs de ses rencontres et de ses discussions avec Charles De Gaulle, John F. Kennedy, Willy Brandt, Nelson Mandela, Frederik de Klerk… Elles renvoyaient à des séquences de son amitié avec Hassan II, Haïlé Sélassié, Habib Bourguiba, Amani Diori, Omar Bongo. Elles éclairaient ses divergences, toujours empreintes de beaucoup de courtoisie, avec Sékou Touré, Modibo Kéita, Kwame Nkrumah, Léopold Sédar Senghor. Elles étayaient son vécu de la guerre froide et on y retrouvait tour à tour des échos de son lointain passé de militant communiste, de sa vie de député et de ministre d’Etat en France, les souvenirs de ses débats et de ses prises de parole héroïques à Grand Bassam, à Bamako, à Ouagadougou.
Houphouët, le bâtisseur
La pensée d’Houphouët-Boigny, c’est la réflexion vivante sur les figures historiques, mais c’est aussi son action en tant que bâtisseur de la Nation.
Vitrine d’une colonisation française réussie, la Côte d’Ivoire présentait déjà dans les années 1970 un visage futuriste. Des tours d’Abidjan, la qualité des routes, les tentatives d’implantation d’industries dans les régions, le soutien de l’Etat aux produits agricoles, le développement volontariste des cultures vivrières, etc. : tous ces grands travaux ont donné au pays, un élan soutenu à la base par une forte politique d’éducation dont la construction d’écoles, de collèges et de lycées.
« Dans le prolongement de son action, nous avons repris et réalisé l’ensemble du plan directeur de la ville d’Abidjan dont l’exécution a été interrompue pendant la décennie 1980, la fameuse décennie dite perdue. Nous avons rendu l’école obligatoire de six à seize ans en Côte d’Ivoire.
De 2011 à 2019, c’est à dire en en moins de dix (10) ans, mon équipe et moi sommes fiers d’avoir construit plus de ponts, plus de routes, plus d’écoles que pendant les 20 années précédant mon accession à la magistrature suprême.
Quand on regarde la cité administrative d’Abidjan-Plateau, que nous venons de rénover, quand on voit le parachèvement de l’autoroute du nord dont les travaux s’étaient arrêtés en 1980, quand on observe l’Hôtel Président à Yamoussoukro, réalisé fin 1970, on ressent un appel vers toujours plus de dignité et de grandeur, car pour lui, en matière d’infrastructures, il faut s’atteler à faire ce qui est beau et peut durer sur des décennies. Les travaux du métro d’Abidjan, du Pont Henri Konan Bédié ou du 4e Pont Yopougon-Plateau, le déplacement effectif de la capitale à Yamoussoukro et j’en passe, s’inscrivent dans cette dynamique » a rappelé Alassane Ouattara.
De l’intégration africaine et le repli identitaire
« Houphouët-Boigny et son syndicat agricole africain crée en 1944, ont été des acteurs de l’intégration régionale par l’économie (…) Né à Yamoussoukro au Centre de la Côte d’Ivoire, en pays baoulé, politiquement contesté et combattu dans le Sud, c’est à Korhogo dans le Nord, en pays senoufo, qu’il remporte son premier poste électif en tant que député, grâce, notamment, au grand-père de notre actuel Premier Ministre, Amadou Gon Coulibaly, et du Président Ouezzin Coulibaly (…) Aujourd’hui où les tentatives de replis ethno-politiques se font sentir, il est important de rappeler que Houphouët-Boigny a été d’abord adoubé hors de son terroir » a rappelé Alassane Ouattara avant de conclure :
« Aujourd’hui, l’ombre d’Houphouët-Boigny plane sur toute la Côte d’Ivoire. Presque tous les Ivoiriens, sans considération d’obédience politique ou religieuse, lui vouent un culte. C’est une excellente chose mais encore faut-il que chacun reste ouvert aux principales leçons dont la vie du Président Houphouët reste le témoignage ; des leçons de modestie, d’unité, de modernité et de don de soi… » .
Philippe Kouhon