Dans 13 jours la France aura un nouveau président. Le premier tour de l’élection présidentielle, tenu le dimanche 23 avril 2017, a placé deux personnages politiques au parcours opposé en tête des suffrages exprimés : Marine Le Pen et Emmanuel Macron.
Marine est avocate. Elle a 48 ans et a travaillé dans l’ombre , et dans le parti (Front National) crée par son père, avant d’en prendre les rênes , et de s’affirmer contre Jean Marie Lepen .
Emmanuel Macron est né le 21 décembre 1977 à Amiens (France). C’est un haut fonctionnaire et banquier d’affaires français. Il a été membre du parti socialiste entre 2006 et 2009. Après avoir participé à la campagne présidentielle de 2012 en faveur de François Hollande, ce dernier le nomme dans son cabinet dès son arrivée au pouvoir.
En 2014, Emmanuel Macron est nommé, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique dans le gouvernent Valls II. Il démissionne en 2016 et crée son mouvement « En Marche ». En obtenant 23,9% au premier des présidentielles devant Marine (21,7%), Emmanuel Macron , si l’on en croit les sondages qui lui ont jusque-là été favorables, devrait devenir le président de la France au soir du 7 mai 2017.
En attendant le second tour, des voix s’élèvent en Afrique , en particulier du côté d’Abidjan, pour estimer que le phénomène et la réalité qu’incarne le parcours de Macron, sont possible sur le continent. Et l’on prédit déjà que tel ou tel acteur politique, est le prochain Macron.
Une sorte de projection de soi dans la politique française, aussi bien de la part des partisans présumés de la France-Afrique, que des souverainistes et anti-colonialistes présumés. ” C’est cela le problème des Africains. Alors que le ministre du Budget en Côte d’Ivoire est aussi jeune que Macron, et avant même que Macron soit arrivé quelque part , des gens se demandaient si lui pourrait être le Macron ivoirien, alors qu’on pouvait aussi se demander pourquoi Macron n’a pas été le Cissé français en devenant ministre aussi jeune que lui “, déplore un commentateur.
N’empêche le débat se fait . Alors qui seront les prochains Macron en Afrique et en Côte d’Ivoire ? Ou plutôt Macron peut-il être ( devenir ) une réalité ivoirienne et africaine, étant entendu les acteurs politiques et populations en Côte d’Ivoire et en Afrique n’ont pas toujours le meilleur rapport – ou le même rapport- à la démocratie, au poids de l’argent , et aux débats d’idées en politique, comme en France. Un des obstacles à vaincre pour tous ceux qui sont tentés par le “Macronisme”ambiant, en Afrique.
[ En Côte d’Ivoire certaines personnes pensent que le Macron ivoirien se trouve parmi les cas suivants : Guillaume Soro, Tidiane Thiam , ou dans le ticket Mabri-Gnamien Konan ]
Pour Alafé Wakili (journaliste), le choix se fera entre un insoumis, un rebelle ( à la façon Talon contre Yayi Boni , ou à la façon Mélenchon contre le système ), d’une part et d’autre part , une sorte de rénovateur à la façon Macron qui en réalité n’est pas porteur d’une idéologie de rupture , au delà du fait que lui-même, incarne la rupture. “ Macron est peut-être un homme de rupture, mais il n’est pas porteur d’une idéologie ou d’un programme politique de rupture. Le fait que des ralliements rapides et faciles se fassent à lui si vite, montre à tous qu’il est bien un pur produit du système“, estime le journaliste.
Selon lui, Guillaume Soro pourrait être cet insoumis surfant entre Patrice Talon et Mélenchon s’il sort du RDR ou RHDP .
” Tidiane a besoin que le PDCI l’adoube. Je ne crois pas qu’il puisse se mettre “en marche “, avec un mouvement comme Macron l’a fait alors que certains de ses proches souhaitent qu’il soit totalement indépendant. Maintenant si le Président Bédié l’adoube, reste à savoir si en venant au nom du PDCI, il peut fait vraiment Macron qui de son côté s’est gardé de porter les habits du PS , même s’il a eu du mal à convaincre des commentateurs qu’il n’était pas un clone que Hollande n’a pas osé assumer. Je crois aussi que le président Ouattara a peut-être un coup à jouer dans cette affaire. Par rapport à l’alternance, il peut lui aussi être tenté de “fabriquer” son propre Macron. Faire sortir par exemple un candidat de son système, créer son insoumis, son Sarkozy à lui, pour ne pas dire son Macron; ensuite accepter officiellement l’alternance pour le PDCI , en misant sur un rejet des candidats classiques et traditionnels annoncés pour donner les moyens à son vrai candidat hors système apparent . Ce Macron ou ce Sarkozy que Chirac finit par accepter ( après l’échec du meilleur Juppé et de De Villepin ), peut justement être Soro ou Hamed Bakayoko. Le problème est que puisque moi j’y pense et que j’en parle , sans doute personne ne croira à une vraie rupture entre lui et ces insoumis ou rénovateurs à venir », analyse Alafé Wakili.
Pour l’ex ministre ivoirien Sidiki Konaté, il ne peut y avoir d’alternative en Côte d’ivoire en dehors du RHDP et du FPI, en tant qu’entité politique , même si le phénomène Macron marque en France la mort provisoire et momentanée des partis politiques.
” Le probable Macron ivoirien est Tidiane Thiam s’il accepte de s’engager. Les autres sont des adoubés du système et des partis politiques traditionnels. Enfin c’est dans 3 ans , et puis la Côte d’ivoire n’est pas la France “, commente Amos Béonao, journaliste.
” Tidiane Thiam a les mains propres et la nouvelle politique veut des nouvelles personnes. La France de Macron de demain pourra l’aider. Un Macron ivoirien doit être un homme propre dans tous les sens, qui n’a pas fait la guerre de Gbagbo avec la France et le peuple sera à 100% avec lui“, renchérit Joseph Tagbo, opérateur économique en Europe.
Selon Eugène Yobouet, journaliste ” si Ouattara fabrique un Macron ivoirien, ce ne sera pas facile pour cette personne de gagner”. ” Le probable Macron ivoirien c’est Soro “, tranche-t-il et d’ajouter : “ Des ivoiriens veulent un homme qui a un discours réconciliateur et qui peut faire l’affaire de tous. Et Soro a bien compris cela“.
Pour Hamed Fof, blogueur, le seul parmi les cas de figure cités plus haut qui semble se prononcer sur ses ambitions pour 2020 est Soro. “Le reste n’est que des rumeurs. Aussi pour aller en Macron il faut avoir le réseau et surtout des soutiens politiques “, conclu-t-il.
Interrogé Fofana Yaya, secrétaire général du MFA estime que ni Soro, ni Tidiane encore moins Hamed Bakayoko n’a le même parcours que Macron. Selon lui, Tidiane Thiam n’a pas d’ambition politique, sinon il aurait accepté un poste dans le gouvernement Ouattara. ” Il faut à n’en point douter, noter qu’il est un pur produit de l’establishment politique crée depuis Félix Houphouët-Boigny. Les ivoiriens veulent le changement. Rompre avec cet establishment politique nécessite de couper avec le cordon ombilical et avec tout ce qui est susceptible de diviser davantage“, dit-il de Thiam.
Pour lui, Hamed Bakayoko pourrait être une alternative en prenant le risque d’aller contre la discipline de son parti politique : ” Mais là encore, il faudra attendre le congrès du RDR pour savoir le nouveau rôle de responsabilité qu’il aura à occuper dans les instances de ce parti avant de se prononcer sur son ambition à la présidentielle“.
Sur le cas Soro, il dit : ” Soro ne veut pas prendre de risque sachant bien que le temps joue contre lui. Sa posture à l’Assemblée nationale l’empêche de se prononcer sur ses intentions réelles pour les présidentielles “. Il conclut : “On peut aussi envisager un ticket gagnant tel que la liste Mabri-Gnamien Konan“.
Ce qui permet à Alafé Wakili de renchérir : “ En France c’est un candidat Président, chez nous en 2020, ce sera deux candidats, un Président et un vice-président. Dans les débats qui se font depuis, personne ne présente de ticket, celui qui veut un Macron, ou un insoumis , comme Président et leader peut-il accepter que l’image de ce Macron à l’ivoirienne soit ternie par celle de son éventuel vice-président ? En réalité il nous faudra non un seul, mais 2 Macron en Côte d’Ivoire en 2020. Enfin, ceux qui disent que Soro est jeune ou pressé, ne doivent pas oublier qu’il a depuis septembre 2002, 15 ans de vie politique et publique. C’est un atout, c’est une expérience avec ses hauts et ses bas , mais en terme de renouveau , et de désir d’alternance , de révolte contre la classe politique, n’est-il pas périlleux de jouer la carte du « dégagisme » contre les anciens et les vieux, car on peut avoir 50-60 mais zéro année de politique, tandis qu’à 45 ans , comme Soro on peut avoir près de 20 ans de vie politique. Mais comme dirait l’autre, The Game is Over et que le peuple se prononce librement, sans la pression du poids des sondages chez nous “.
Le débat est ouvert et vous pouvez réagir en envoyant vos contributions à afrikipresse@gmail.com
NB : ” J’ai décidé de me présenter à l’élection présidentielle car je veux construire une vraie alternance, redonner à chaque française et chaque français confiance en soi, confiance en la France et dans notre capacité collective à relever nos défis. Ce faisant, nous redonnerons à l’Europe et au reste du monde confiance en notre pays ” dixit, Emmanuel Macron.
Réalisé par Philippe Kouhon
