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Quel parallèle établir entre la situation de la Côte d’Ovoire en 2010 et celle de l’équipe nationale ivoirienne de football à la fin des matches de poule de la can 2024 ?

Quel parallèle établir entre la situation de la Côte d’Ovoire en 2010 et celle de l’équipe nationale ivoirienne de football à la fin des matches de poule de la can 2024 ?
Publié le
Par
Christian Gambotti
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Alassane Ouattara, Emerse Faé : même combat. De la disparition à la renaissance

La Côte d’Ivoire, avant l’élection présidentielle de 2010, et l’équipe nationale de football, avant le match de poule entre le Maroc et la Zambie, sont dans la même situation : sur le point de disparaître. En 2010, après des années de gouvernance approximative (1995-1999) et des années de soubresauts tragiques (1999-2010), la Côte d’Ivoire est un État failli qui a disparu des écrans-radar des scènes africaine et internationale. 

Elle n’existe qu’à travers le récit des crises politiques et des violences ethniques qu’elle traverse (coup d’État militaire de 1999, guerre civile, partition du pays, grave crise postélectorale de 2010). En 2010, Laurent Gbagbo est battu, remplacé par Alassane Ouattara qui est élu président de la République de Côte d’Ivoire. Une nouvelle page du pays va s’ouvrir sous le signe de la reconstruction.

À la fin des matches de poule, après avoir subi une humiliante défaite (4-0) contre la Guinée Équatoriale, l’équipe nationale ivoirienne, qui n’est plus maître de son destin, est au bord de l’élimination. Elle se qualifiera parmi les meilleurs troisièmes. Cette qualification s’explique par le match nul concédé par le Ghana, puis par la courte victoire du Maroc face à la Zambie. 

Jean-Louis Gasset, le sélectionneur français est alors limogé et remplacé par l’ancien international ivoirien, Émerse Faé. C’est une  nouvelle page de la compétition qui s’ouvre pour les « Éléphants ». Dans la phase des matches à élimination directe, les « Éléphants » battront le Sénégal (8ème de finale), le Mali (quart de finale), la RDC (demi-finale), pour l’emporter sur le Nigéria en finale. 

De 2010 à nos jours, Alassane Ouattara a reconstruit la Côte d’Ivoire pour en faire un pays émergent. Depuis la courte victoire du Maroc sur la Zambie, le 24 janvier 2024, Émerse Faé a reconstruit l’équipe nationale ivoirienne pour l’amener jusqu’au sacre final, le dimanche 11 février 2024.

Je ne crois ni à la chance, ni aux signes du destin, même si, à un moment donné, les planètes sont alignées. L’alignement d’au moins trois planètes sur la même ligne est un phénomène rare. Par analogie, l’expression « planètes alignées » désigne la concomitance exceptionnelle de plusieurs événements favorables. Je crois plus à la capacité de certains individus, dont font partie Alassane Ouattara et Émerse Faé, de saisir les opportunités que leur offre la chance.

Alassane Ouattara et Émerse Faé, chance et compétence

Napoléon, lorsqu’il recrutait un officier dont on lui vantait les qualités, disait : « Fort bien, mais a-t-il de la chance ? » La chance est nécessaire, mais Napoléon cherchait à savoir si, à partir des circonstances que la chance offre à un individu, ses officiers seraient capables de prendre les bonnes décisions, saisir les opportunités qui se présenteraient à eux, afin d’assurer la victoire de l’armée impériale. 

Il serait absurde de réduire la réussite de la gouvernance Ouattara de 2010 à nos jours et la réussite d’Émerse Faé dans les matches à élimination directe de la CAN au seul facteur chance. Si la chance offre des opportunités, elle doit s’accompagner des compétences nécessaires dans les processus de décision. La chance est la compagne de la compétence. 

Il ne faut jamais, en matière de gouvernance politique comme dans le travail de sélectionneur d’une équipe de sport, dissocier la chance, l’intuition et la compétence, qui sont des outils d’aide à la décision. L’intuition est cette voix intérieure qui nous guide. Le sélectionneur étranger, Jean-Louis Gasset, avait sûrement les compétences techniques, mais avait-il la chance et l’intuition sans lesquelles il n’est pas possible d’être là au bon moment ?

Pour Churchill, la chance n’existe pas, elle se provoque par l’attention portée aux détails et la disposition dans laquelle on place son esprit pour aller vers la victoire. Alassane Ouattara a su installer, de façon durable, la Côte d’Ivoire sur la trajectoire du développement, de la stabilité politique et de l’unité nationale. 

Émerse Faé, sans jamais preuve d’un excès de confiance, a su installer l’équipe nationale ivoirienne sur la trajectoire des victoires. Ses choix se sont nourris d’une parfaite connaissance des capacités de ses joueurs et de l’âme ivoirienne. Je crois qu’il est temps, pour les fédérations sportives africaines, de choisir, comme entraîneurs-sélectionneurs, des nationaux. 

Après l’élimination de l’Égypte à la CAN, l’ancien attaquant vedette des Pharaons, Hossam Hassan, a été nommé sélectionneur de l’équipe nationale à la place du Portugais Rui Vitoria, remercié dimanche dernier. Alassane Ouattara possède les compétences qui lui ont permis, depuis 2010, de faire de la côte d’Ivoire le nouveau leader économique et politique de l’Afrique de l’Ouest.

Alassane Ouattara et Emerse Faé : même combat

Depuis 2010, l’émergence de la Côte d’Ivoire, désormais classée parmi les pays à revenu intermédiaire, n’est pas un « second miracle » ivoirien. La victoire des « Éléphants » en finale de la CAN n’est pas un autre « miracle ». Certains font même de la réussite de la CAN le symbole du « second miracle » ivoirien. Erreur d’analyse : la réussite de la CAN, réussite dans l’organisation et réussite sportive, est le signe de la remarquable évolution du pays depuis 2010. 

En 2024, la CAN apparaît comme un outil supplémentaire qui permet de développer l’économie ivoirienne, rendre palpable l’évolution de la société, consolider le leadership du pays en Afrique de l’Ouest et assurer son rayonnement sur tout le continent et la scène internationale. L’économie et le sport, des concepts-clefs des relations internationales, sont des outils de puissance. 

La Côte d’Ivoire connaît dans ces deux domaines une réussite qui permet de parler de « modèle ivoirien ». Alassane Ouattara et Émerse Faé mènent un même combat décisif pour leur pays, mais aussi pour toute l’Afrique. Ils incarnent la fierté d’être ivoirien et africain.

Christian GAMBOTTI –  Agrégé de l’Université – Président du think tank Afrique & Partage –  Président du CERAD (Centre d’Etudes et de Recherches sur l’Afrique de Demain) – Directeur général de l’Université de l’Atlantique (Abidjan) – Chroniqueur, essayiste, politologue. Contact : cg@afriquepartage.org

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