L’inscription récente de la Côte d’Ivoire sur la liste grise du Groupe d’Action Financière (GAFI) a surpris de nombreux observateurs. Ce classement, censé renforcer la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, soulève des interrogations quant à sa légitimité, surtout dans un contexte où le pays a initié d’importantes réformes financières depuis 2011. Retour sur les efforts de la Côte d’Ivoire et analyse des enjeux qui entourent cette décision.
Depuis 2011, la Côte d’Ivoire a mis en place un arsenal juridique et institutionnel destiné à assainir son système financier. La création de la Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières (CENTIF) et du Pôle Pénal, Économique et Financier (PPEF) témoigne d’une volonté politique forte de lutter contre les infractions économiques. En augmentant les ressources dédiées à ces structures, les autorités ont montré leur engagement à surveiller de près les transactions financières.
En outre, la Côte d’Ivoire s’est alignée sur les normes internationales dictées par le GAFI pour garantir la transparence de ses flux financiers. Ce processus d’adaptation aux recommandations internationales a renforcé la crédibilité financière du pays, comme en témoigne l’amélioration de sa note par des agences de crédit reconnues, telle que Moody’s.
Un signe de confiance : L’attrait continu des investisseurs internationaux
Malgré cette inscription sur la liste grise, la Côte d’Ivoire conserve la confiance des investisseurs étrangers, notamment à travers le succès de ses émissions de titres sur les marchés internationaux. En janvier 2024, une émission de euro bonds a attiré 8 milliards de dollars de souscriptions pour une offre initiale de 2,6 milliards de dollars, ce qui illustre l’intérêt et la reconnaissance des acteurs financiers internationaux pour l’économie ivoirienne.
Cet engouement est le reflet de la solidité économique du pays, de son potentiel de croissance et de l’impact positif des réformes entreprises. La Côte d’Ivoire reste donc un partenaire crédible et attractif sur la scène financière internationale, en dépit de la décision du GAFI.
La diaspora libanaise : Un bouc émissaire géopolitique?
Parfois présentée comme un risque potentiel en raison des tensions géopolitiques au Moyen-Orient, la diaspora libanaise en Côte d’Ivoire a pourtant joué un rôle actif dans le développement économique du pays depuis des décennies. Si certains analystes associent cette communauté à des activités potentiellement sensibles, cet argument paraît peu fondé dans le contexte ivoirien. La contribution économique de cette diaspora est indéniable, et son implication en Côte d’Ivoire n’est pas directement liée aux dynamiques de conflit au Liban. Cet amalgame reflète davantage des préoccupations géopolitiques externes qu’une réalité économique locale.
Les enjeux politiques internes : Une décision instrumentalisée ?
Alors que la Côte d’Ivoire approche de l’élection présidentielle de 2025, l’inscription sur la liste grise du GAFI pourrait être exploitée à des fins politiques par des opposants au pouvoir. Cependant, il convient de souligner que les actions menées par le gouvernement ivoirien pour assainir le secteur financier ont reçu une reconnaissance internationale. Le parti au pouvoir, le RHDP, peut se prévaloir d’une gestion proactive et transparente, ce qui rend les tentatives de manipulation des faits peu convaincantes et potentiellement vaines.
Une décision polémique au regard des réformes accomplies
La Côte d’Ivoire a pris des mesures substantielles pour répondre aux attentes internationales en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. L’inscription sur la liste grise du GAFI semble ainsi davantage motivée par des enjeux géopolitiques que par des manquements réels au niveau de son cadre réglementaire. En maintenant la confiance des investisseurs et des partenaires financiers, le pays démontre qu’il reste un acteur financier stable et fiable dans la région, malgré des critiques aux motivations discutables.
Philippe Kouhon