La commission électorale nationale indépendante –CENI- a proclamé les résultats globaux provisoires du scrutin présidentiel du 11 octobre. Selon la CENI, le Président sortant, Alpha Condé est réélu dès le premier tour avec 57,85% des suffrages exprimés. Son challenger, Cellou Dalein Diallo est crédité d’un peu plus de 31,46% des suffrages exprimés.
Ce dernier, rejette en bloc ces résultats, annonçant qu’il ne fera pas recours la cour constitutionnelle et promet de manifester ‘’au moment venu’’. Pour analyser cette actualité, Afrikipresse a interrogé Mohamed Camara, juriste et professeur de droit dans plusieurs universités à Conakry.
Afrikipresse : Quelle analyse faites-vous de la récente déclaration de Cellou Dalein Diallo qui annonce qu’il ne fera pas recours à la cour constitutionnelle malgré les différentes anomalies qu’il continue de dénoncer ?
Mohamed Camara : C’est une déclaration à valeur de pression politique exercée sur les pouvoirs publics. Mais ça n’a pas d’impact juridique en tant que tel parce que s’il y avait un retrait qui était fait entre la date de la publication de l’arrêt de la cour constitutionnelle portant la publication de la liste et la tenue du premier tort, c’est-à-dire, dans cet intervalle, si un seul candidat se retirait, en ce moment, l’élection allait être reportée et des nouvelles listes allaient être rendues publique –article 34, aliéna 4 de la constitution guinéenne-.
Maintenant, le fait pour lui de ne pas explorer les voies de recours au plan juridictionnel, en terme de parti politique, c’est exercer une influence pour dire qu’il doit être cité également en terme de force politique de l’opposition. Mais l’inconvénient de cela, c’est que ça ne montre pas une valeur républicaine. Même si ça a une valeur de sagesse pour calmer les esprits, ça ne montre pas une valeur républicaine qui consiste à saisir les juridictions pour qu’elles tranchent. Comme il avait déjà commencé par contester les résultats en avant-première , alors saisir les juridictions sans obtenir gain de cause, serait de nature à décrédibiliser sa propre posture dans le cadre des revendications qu’il faisait quant à l’anomalie signalée par-ci par-là.
Le fait de ne pas faire recours aux voies légales pour faire valoir ses droits, n’est-ce pas une autre façon d’ignorer les voix de ses partisans ?
Non, ce n’est pas cela. C’est une stratégie pour éviter qu’il perde sur toute la ligne, carrément la face. Mais il est en train seulement de rester dans une posture politique sans explorer la posture juridique. Parce que, quand il explore la posture juridique, à priori il va dire que la cour a déjà blanchi tout le monde pour valider ou invalider tout. Donc, le fait de ne pas inviter les citoyens à la manifestation constitue une sagesse. Mais le de fait de laisser un suspens, c’est pour éviter que le pouvoir public ne pense qu’il est le seul à bord. Qu’il ait présent à l’esprit qu’il y a une force politique de l’opposition qui peut à la limite mettre en exécution sa menace des manifestations ce qui ne peut pas du tout projeter une quiétude au niveau du pays à l’effet d’attirer les investisseurs à venir aider la Guinée.
C’est purement stratégique et surtout, une manière de répondre aux autres acteurs politiques de l’opposition qui ont voulu jouer au serpent de mer pour torpiller le forceps à ce niveau, et l’échec est très patent à leur niveau. Donc ça montre qu’il y avait une querelle de leadership entre les acteurs eux-mêmes, sinon, ils devraient se concerter pour trouver une stratégie commune qui pourrait donner satisfaction à leur propre idéal. Mais si à ce niveau, ils n’ont pas tiré les conséquences, ils ont consommé leur énergie jusqu’à ce stade et se retirer, c’est tout simplement pour jeter un discrédit sur le processus.
Vu les anomalies constatées ça et là lors du scrutin, si toutefois les autres candidats déposaient des requêtes, peut-on s’attendre à un changement des résultats au niveau de la cour constitutionnelle ?
Bien entendu, pour vuque les requêtes qui vont être formulées respectent le délai des 8 jours qui suivent la publication des résultats globaux provisoires par la CENI, mais aussi que les requêtes aient pour auteurs les requérants eux-mêmes. Au frais de tout cela, comme la cour constitutionnelle est en train de jouer son baptême de feu, c’est possible justement de mettre tout cela en application.
Entretien téléphonique réalisé par Aliou BM Diallo