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AIF 2022 – Kobenan Kouassi Adjoumani appelle à l’union pour faire face aux défis de la sécurité alimentaire

AIF 2022 – Kobenan Kouassi Adjoumani appelle à l’union pour faire face aux défis de la sécurité alimentaire
Publié le
Par
Yaya Kanté
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Kobenan Kouassi Adjoumani a appelé les États Africains à s’unir et travailler ensemble pour faire face aux différents défis de la sécurité alimentaire lors de l’édition 2022 de Africa Investment forum.

Le ministre d’État ivoirien, ministre de l’agriculture et développement rural, Kobenan Kouassi Adjoumani a exhorté les États Africains à s’unir et travailler ensemble pour faire face aux différents défis de la sécurité alimentaire. Il intervenait lors de la session plénière consacrée à la sécurité alimentaire de l’Africa Investment forum (AIF) qui s’est tenue le jeudi 3 novembre 2022 à Abidjan.

Dans son message, le ministre d’État, sur le thème “Sécurité alimentaire : Comment l’Afrique peut-elle construire son autosuffisance alimentaire?”, a invité les pays africains à aller au-delà de l’autosuffisance alimentaire pour mettre en place des politiques coordonnées pour atteindre la sécurité alimentaire. Ci-dessous l’intégralité de son discours.

Kobenan Kouassi Adjoumani et Kaba Nialé. Photo DR

_______________________________

Madame la Ministre du Plan et du Développement,

Chers collègues Ministres ;

Monsieur le Président du Groupe de la Banque Africaine de Développement ;

Mesdames et Messieurs les Représentants des partenaires au développement ;

Mesdames et Messieurs les Représentants du secteur privé ;

Mesdames et Messieurs les Représentants des organisations professionnelles agricoles ;

Mesdames et Messieurs les Représentants de l’administration publique ;

Honorables Invités ;

Mesdames, Messieurs ;

C’est avec un grand plaisir que je prends part à cette session plénière sur le thème : Sécurité alimentaire : comment l’Afrique peut-elle construire son autosuffisance alimentaire ?

Permettez-moi à l’entame de mon propos, de remercier les organisateurs de ce prestigieux forum sur l’investissement en Afrique, qui ont bien voulu nous associer aux travaux de cette session.

Je me réjouis de la qualité des participants qui prennent part à cet important rendez-vous. Je ne doute pas que leur implication aux différents travaux qui ont été réalisés en amont, est en réalité, le signe de l’importance qu’ils attachent à l’atteinte de la sécurité alimentaire des populations en Afrique et tout particulièrement en Côte d’Ivoire.

Mesdames et Messieurs, 

L’Afrique dispose de plus de 60% des terres arables non encore cultivées. L’agriculture contribue à une part importante du Produit Intérieur Brut de la plupart des pays africains et emploie environ 60% de la main d’œuvre active. En un mot, l’Afrique dispose d’un immense potentiel de terres arables et l’agriculture demeure un secteur économique majeur au niveau du continent.

Malgré cela, l’Afrique peine depuis plusieurs décennies à assurer la sécurité alimentaire de sa population. 

Depuis quelques années, plusieurs initiatives ont été menées pour inverser la tendance. Nous avons par exemple :

  • le Programme Détaillé pour le Développement de l’Agriculture Africaine (PDDAA) de l’Union africaine qui vise à améliorer la productivité agricole et qui repose sur quatre piliers à savoir : la gestion durable des terres; la maîtrise fiable des eaux; l’amélioration des infrastructures rurales et des capacités commerciales d’accès  aux marchés et l’amélioration de la recherche agricole, de la diffusion et de l’adoption de technologies.
  • Nous avons aussi les Programmes Nationaux et Régionaux de sécurité alimentaire de la FAO qui soutiennent les efforts nationaux d’éradication de la faim parmi les populations locales et de promotion de l’intégration régionale et du développement économique agricole des pays voisins.
  • Un autre exemple que l’on pourrait citer est celui de la mise en place de la Nouvelle Alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition, dont le but est d’accroître les investissements privés dans l’agriculture africaine. 

Mais celles-ci se heurtent malheureusement à des problèmes persistants qui perturbent énormément les systèmes de production alimentaire. Je veux parler des crises sanitaire, énergétique et environnementale, du changement climatique, de l’inflation, des guerres, des tensions et ruptures des chaînes d’approvisionnement, etc. La pandémie à Covid-19, par exemple, a affecté les moyens de subsistance de dizaines de milliers d’agriculteurs africains. La perturbation des chaînes d’approvisionnement en intrants agricoles a ainsi eu un impact significatif sur la capacité de production vivrière de la plupart des pays. Et il a fallu que nos pays mettent en œuvre des actions urgentes basées sur des subventions aux cultures vivrières. C’est le cas pour mon pays, la Côte d’Ivoire, qui a mis en place un programme d’urgence pour la production du manioc, de la banane plantain, du riz, du maïs et des légumes. 

Il y a également le problème du changement climatique qui ébranle les systèmes de production et perturbe fondamentalement l’équilibre biologique, de sorte qu’on assiste à l’apparition de nouveaux ravageurs des cultures. 

L’effet des émissions mondiales des gaz à effet de serre sur les changements climatiques en Afrique, se traduit par la perturbation des saisons, la rareté de l’eau, l’absence des pluies dans certaines zones, les sécheresses intenses ; autant de facteurs qui handicapent les productions à un plus haut point.

Enfin, on note le problème plus récent de la crise russo-ukrainienne. Celle-ci a montré que nos pays, malgré leur bonne volonté de réussir, peuvent être confrontés à des défis encore plus importants quant à leurs approvisionnements en intrants de production et en céréales. En Côte d’Ivoire, nous avons assisté à l’augmentation du coût des intrants agricoles dont l’urée, avec plus de 150% d’augmentation, et une réduction du stock local en céréales, notamment le blé. 

Mesdames et Messieurs,

Honorables Invités, 

Comment faire face à ces problèmes pour assurer de façon durable la sécurité alimentaire de nos populations africaines ? 

Je crois sincèrement que l’Afrique doit définitivement revenir aux fondamentaux de l’agriculture. Certains pays se sont départis de ces fondamentaux après avoir choisi de mettre l’accent sur d’autres secteurs, au détriment de l’agriculture.

En premier lieu, il nous faut asseoir un cadre conceptuel qui garantisse la cohérence de nos politiques agricoles, la définition de nos priorités et de nos actions dans le domaine de la production alimentaire. En effet, nos choix de politiques agricoles et d’actions de lutte contre l’insécurité alimentaire récurrente dépendent de notre façon de concevoir les notions de sécurité alimentaire, d’autosuffisance alimentaire et de souveraineté alimentaire.

En s’alignant sur l’explication arrêtée lors du Sommet Mondial de l’Alimentation de 1996, « la sécurité alimentaire est assurée quand toutes les personnes, en tout temps, ont économiquement, socialement et physiquement accès à une alimentation suffisante, sûre et nutritive qui satisfait leurs besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires pour leur permettre de mener une vie active et saine ».

Cette définition englobe les différentes dimensions de la sécurité alimentaire à savoir la disponibilité alimentaire, l’accès à la nourriture, la stabilité et la salubrité.

Quant à l’autosuffisance alimentaire, elle traduit la capacité de satisfaire tous les besoins alimentaires d’une population par la seule production nationale.

Ainsi, la sécurité alimentaire est un concept plus vaste que l’autosuffisance, dans la mesure où elle inclut la possibilité de jouer sur les capacités d’importation d’un pays et non pas seulement sur la production nationale.

En Côte d’Ivoire, il existe une Loi d’Orientation Agricole qui clarifie le cadre de nos interventions. Elle insiste particulièrement sur la sécurité alimentaire, mais également sur la souveraineté alimentaire, entendue comme le choix politique d’un Etat ou d’un groupe d’Etats de produire l’essentiel de son alimentation sur son territoire sans qu’il puisse y avoir un effet négatif sur les populations d’autres pays.

La Loi d’Orientation Agricole permet de mettre en place des politiques favorables et cohérentes pour la sécurité alimentaire. Elle évite en effet, dans un pays donné, que chaque institution ait son approche propre, induisant ainsi des inefficacités dans la lutte contre l’insécurité alimentaire. 

Produire l’essentiel de notre alimentation sur place requiert non seulement le développement du sous-secteur semencier, mais surtout de mettre l’accent sur le développement des produits locaux comme priorité de choix de la base de l’alimentation de nos populations. De nombreux pays africains continuent d’importer les semences dont ils ont besoin pour la production vivrière. Même les programmes d’urgence alimentaire sont basés sur l’acquisition de semences importées. Elles coûtent chères, elles sont mal maitrisées par les paysans et souvent inadaptées à nos sols. La conséquence est qu’on continue de produire très peu de produits vivriers pour les besoins de nos populations.

Nous devons donc, en second lieu, développer nos filières semencières. Cela implique que nos Etats financent sur leurs budgets la recherche agronomique sur les semences et qu’ils prennent les textes pour encadrer les activités des acteurs exerçant dans le secteur des semences et engrais.

En outre, l’action d’accorder une priorité à nos produits locaux permet de se soustraire de la dépendance extérieure vis-à-vis des importations. La notion de souveraineté alimentaire trouve là sa place en accordant une attention au développement des innovations en vue de l’amélioration des systèmes de production de culture endogène.

En Côte d’Ivoire, c’est dans cette direction que nous sommes maintenant engagés, dans la promotion des chaînes de valeur de manioc, de céréales locales, de plantain, de l’igname, de légumes, qui peuvent nous amener à contenir les crises exogènes et à faire face au défi de changement climatique.

Enfin et en troisième lieu, il nous faut mettre en place une agriculture vivrière qui génère des gains, qui soit profitable aux paysans. Les paysans africains ne voient aucun intérêt à se lancer dans une agriculture moderne, qui va permettre de produire plus, si cela ne leur procure aucun gain substantiel. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle tous les appels à la modernisation de l’agriculture de nos Etats sont restés au stade du discours politique. 

En la matière, en Côte d’Ivoire, l’un des objectifs affichés du Chef de l’Etat, Son Excellence Alassane OUATTARA, à travers la mise en œuvre du Programme National d’Investissement Agricole de deuxième génération (PNIA 2), est de parvenir à une agriculture ivoirienne durable, compétitive, et créatrice de richesses équitablement partagées.

Cet objectif se met en œuvre à travers les projets d’agropoles dont ceux du Bélier et du Nord sont en cours d’exécution. Dans ces projets, la question de la sécurité alimentaire est traitée de façon holistique, de sorte à financer toute la chaîne des valeurs alimentaires afin de permettre aux paysans de réaliser des profits importants.

Mesdames et Messieurs

Avant de mettre un terme à mes propos, il est essentiel d’indiquer que les Etats Africains doivent s’unir et travailler ensemble, pour faire face aux différents défis de la sécurité alimentaire. C’est de cette façon que nous pourrons atteindre nos objectifs par des approches synergiques entre Etats. 

En outre, il est plus profitable de produire ce que nous consommons. Avec nos potentialités (terres arables, fleuves), nous devons nous accorder pour disposer de moyens conséquents pour la mise en valeur et pour l’exploitation de ces potentialités. 

Je ne pourrais terminer mes propos sans adresser mes remerciements aux organisateurs de ce forum.

J’ai bonne foi que nos échanges sur le thème de notre panel permettront d’arrêter une vision commune sur la manière de sortir l’Afrique de l’insécurité alimentaire.

Je vous remercie.

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